Bruno Valencony:
"Je n'ai pas envie de quitter le club en cours de construction."
Extrait
Le jour de ta prolongation de contrat, le coach t'a présenté comme « le capitaine du banc ». Quelle est pour toi la signification de ce titre ?
C'est le terme que le
coach emploie depuis un an et demi que je suis sur le banc. Même si ce n'était
pas une situation facile à vivre au début, je m'y suis fait. Cela prouve
certaines choses quant à mon implication dans le groupe. Mais même sans ce
titre, je sais que les fonctions d'un joueur sur le banc sont d'être présent et
d'encourager ceux qui sont prêts à rentrer pour faire gagner un match. C'est un
rôle un peu particulier, mais il a également son importance.
Y attaches-tu une
grande importance ?
Bien entendu, même s'il
faut également que je pense à moi. Mon poste fait que mes chances d'intervenir
en cours de rencontre sont les plus minimes des joueurs sur le banc, mais je
dois quand même prendre soin de ma préparation. Quand tu es gardien de but c'est
difficile de se mettre dans la peau de celui qui va rentrer parce que cela
implique l'expulsion ou la blessure du titulaire. Ce n'est pas une chose que tu
espères, tu abordes donc le match différemment des autres remplaçants qui
peuvent intervenir dans la partie sur un choix tactique, l'évolution du score ou
une méforme d'un joueur. Personnellement, je tiens donc à m'impliquer du mieux
possible dans les deux facettes de mon statut celle collective et celle
individuelle.
Peut-on dire que la
page de la compétition est presque définitivement tournée ?
Les choses ont été difficiles pour moi les temps qui ont suivi l'accession. Quand vous participez activement à une saison comme celle de la montée, il vous faut une certaine période pour digérer votre changement de statut. Mais j'ai fait en sorte de toujours garder cet esprit de compétition qui m'animait lorsque je gardais les buts en tant que titulaire. Je continue donc à cultiver cette mentalité aux entraînements et à travers les matchs amicaux ou ceux que je fais avec l'équipe de CFA. Honnêtement, psychologiquement je suis toujours dans le coup...
Pourtant tu as eu des opportunités de remettre les gants comme titulaire, cela ne t'a-t-il pas tenté ?
C'est vrai que certains
clubs, qui avaient suivi mes performances lors de la montée, se sont montrés
intéressés par ma venue. Mais il y a eu un ensemble de choses qui ont fait
pencher la balance pour une stabilité à Nice. Les résultats, l'ambiance, la
confiance des dirigeants et les perspectives de reconversion ont été autant
d'éléments déterminants dans mon choix. Même si le rôle de remplaçant ne me
convenait pas au départ, j'ai pensé à la suite... Et puis mon parcours prouve ma
fidélité. Après huit ans passés à Nice, je me suis dit qu'il y avait encore
beaucoup de choses à faire.
Psychologiquement, te
sens-tu encore totalement footballeur professionnel ?
Je ne me suis jamais trop
posé cette question. Je pense que la proposition de prolongation de contrat du
club est la meilleure réponse. Si les dirigeants ne pensaient pas que j'ai
encore l'esprit 100 % joueur, ils m'auraient sans doute conseillé de raccrocher
et de passer les diplômes d'entraîneur.
Le fait que ta
reconversion soit déjà planifiée te fait-il appréhender le travail quotidien
d'une autre manière ?
Non, dans le sens où,
comme je le disais, je me sens encore pleinement joueur. Et oui par rapport au
fait que les stages de formation m'ouvrent les yeux sur les méthodes
d'entraînement et sur certains choix faits par les coachs lors des séances. Je
me fais ces remarques « à froid », une fois l'entraînement terminé, parce que
sur le terrain je suis pleinement dans mon rôle d'acteur.
Ton rôle va au-delà
de celui de simple doublure. Quelles sont tes relations avec Damien Grégorini et
Enrico Pionetti ?
Elles sont excellentes
avec tous les deux. J'aurais pu avoir une mauvaise réaction lorsque Damien est
arrivé, mais je ne pense pas l'avoir eue. Même si la transition vers le poste de
remplaçant n'est pas facile à vivre, j'ai essayé que cela n'influe pas sur nos
relations. Quant à Enrico, je suis de plus en plus attentif à ce qu'il nous fait
travailler aux entraînements. Je fais la parallèle avec ce que j'ai fait par le
passé et je construis progressivement ma reconversion. Si le club me confirme...
Pour toi, quelles
sont les principales qualités que doit développer un entraîneur de gardien ?
Les spécifications du
poste sont différentes de celles d'un entraîneur classique de par le fait que la
relation est plus étroite et directe entre un goal et son coach qu'entre les
joueurs d'un effectif et leur entraîneur. Il peut exister une complicité et une
confiance qu'il est parfois difficile pour un entraîneur d'instaurer devant le
nombre important d'éléments composés par un groupe. Je pense donc que la
principale qualité d'un coach de gardien est d'être à l'écoute. Il doit
s'adapter en fonction du gardien, de son vécu et de ses demandes. Il doit
prendre connaissance de ses expériences passées pour lui proposer des séances au
contenu diversifié. La clé de la réussite réside dans cet échange et cette
confiance mutuelle.
Tu entraînes déjà les
gardiens du centre de formation le mercredi. Que t'apporte cette première
expérience ?
J'essaye surtout de faire
en sorte de leur apporter à eux. À voir leur attitude quand on se retrouve et
les sourires à la fin des entraînements, j'ai le sentiment que cela se passe
bien. Je leur demande justement de me faire remonter en fin de séances leur
sentiment sur le moment que l'on vient de passer ensemble pour savoir si je suis
dans le vrai, mais ce n'est pas toujours facile. Leur jeunesse place quelques
barrières au niveau du dialogue. Ils font preuve d'une timidité que n'aurait pas
un gardien pro. Je pense qu'ils ont aussi parfois du mal à faire la part des
choses entre le goal pro que je suis et un entraîneur qui essaye de les faire
progresser.
Malgré ton
éloignement progressif des pelouses de L i et de la médiatisation, tu tiens
toujours une grande place dans le coeur des supporters. Plus que les exploits
que tu as réalisés dans les cages rouge et noire, n 'est-ce pas l'investissement
dont tu as fait preuve en dehors du terrain qui te vaut ce statut ?
Je pense que les deux ont
leur importance. Les supporters me parlent encore des bons moments avec la
victoire en Coupe de France de 1997, mais aussi des saisons de galère en D2. Je
me suis toujours fixé une ligne de conduite de ne jamais tricher et d'apporter
le plus que je pouvais au club. Après, il est vrai que les liens qui m'unissent
aux supporters se sont décuplés lorsqu'ils ont vu que je me mobilisais (avec
d'autres joueurs) pour essayer de sauver le club. Tout ça réuni fait
qu'aujourd'hui, il n'y a pas de sentiment d'oubli vis-à-vis de moi. Un
footballeur aime être sur le terrain et apporter ce qu'il peut à son équipe.
Alors quand tu es assis sur le banc lors de chaque rencontre, entendre les
encouragements du public te fait énormément de bien. Cela me permet de ne pas me
sentir exclu du groupe. On évoquait tout à l'heure les raisons qui m'ont poussé
à continuer et celle-là en fait partie.
Avec l'expérience et
le recul que tu as, comment vis-tu l'évolution entrevue par le groupe, et plus
largement par le club ?
Dans un club, les
fondations sont posées par les dirigeants, les joueurs étant là pour rendre à
leur employeur la confiance qui est placée en eux. Il est donc primordial
d'avoir un président et des actionnaires qui sont là avant tout pour l'OGC Nice.
C'était le cas à mon arrivée avec André Boïs et puis les années qui ont suivi
ont été marquées par la venue de dirigeants et de joueurs qui ne servaient pas
les intérêts du club. Nous n'étions que quelques-uns à essayer de préserver
l'essentiel, à savoir le maintien sportif. Avec l'arrivée des nouveaux
dirigeants il y a maintenant plus d'un an, la tendance s'est inversée.
L'investissement de chacun est palpable et cela a entraîné un effet boule de
neige au niveau de la mentalité des joueurs et des supporters qui ont senti
qu'il y avait à nouveau des personnes qui souhaitaient le bien du club. Mais
l'équilibre est encore fragile. On verra la solidité des fondations lorsque l'on
vivra une mauvaise saison...
Cela nous amène
naturellement à évoquer le problème des infrastructures ?
Cela fait partie de la
fragilité que je viens d'évoquer. Il est plus facile de se relever d'une saison
sportive délicate lorsque vous avez des infrastructures dignes de ce nom. Pour
le moment, ce n'est toujours pas le cas. Les installations sont précaires, nous
n'avons qu'un seul terrain d'entraînement, les pelouses du Ray et du
Charles-Ehrmann sont très moyennes, le Grand Stade n'est pas encore pour tout de
suite... On ne peut pas dire que l'on joue dans la cour des grands. Aujourd'hui,
l'OGC Nice ne brille pas pour ses infrastructures, mais tout le monde a
conscience du travail à accomplir. On sent qu'il y a une volonté commune de
construire quelque chose de grand, et chacun à envie de participer. Après ce que
j'ai fait pour le club sur et en dehors du terrain, j'ai envie d'un
accomplissement. Je n'ai pas envie de quitter le club en cours de construction.
Finissons par le
terrain. Quel est ton sentiment au moment de retrouver la pelouse de Furiani ?
Ce sont mes premières
amours. Le Sporting a été mon premier club en pro, j'y ai vécu ma première
montée, mais aussi la catastrophe de Furiani. J'y ai laissé énormément de
souvenirs... Des joueurs comme Lilian qui n'y sont passés qu'un an en gardent
des souvenirs à vie, alors imaginez-moi qui y ai joué neuf ans. La première fois
que j'y suis retourné, tout le stade était debout à l'annonce de mon nom,
j'avais les larmes aux yeux. Maintenant encore, les gens me demandent de
revenir. Je suis quelqu'un qui a toujours tout donné partout où je suis passé et
ce que je fais depuis huit ans ici, je l'ai fait pendant neuf ans là-bas. Pour
faire un parallèle et avoir une vision plus large entre les deux clubs, je
n'aimerais pas que Nice devienne comme Bastia maintenant, c'est-à-dire un club
qui perd son identité. Là-bas, les supporters regrettent les années qui ont
suivi la montée où l'équipe s'appuyait sur la même force collective que l'on a
actuellement. Nous devons conserver cela et ne devons pas devenir un club comme
les autres.
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