Gernot Rohr : " On sera impitoyables "
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« Sud Ouest ». Pour un promu, on dit souvent que la deuxième saison est la plus difficile à négocier. Ce n'est pas le cas pour l'instant. Comment l'expliquez-vous ?
Gernot Rohr. Il faut être prudent. Nous n'avons disputé que dix rencontres, soit même pas un tiers de la compétition. Mais pour le moment, c'est vrai, nous sommes en avance sur notre tableau de marche avec 16 points. Nous avons conservé à peu près la même ossature et, dans le même temps, nous avons diminué le nombre de joueurs sous contrat. Ce qui bonifie la qualité de l'effectif et améliore encore l'ambiance.
Au terme de la saison écoulée, on pouvait craindre que Nice soit dépouillé de ses meilleurs éléments. Il n'en a rien été. Comment avez-vous procédé ?
C'est exact, on nous attendait au tournant. Car nous n'avions pas les moyens de racheter tous les contrats des joueurs prêtés. Pourtant, nous avons réussi à bien négocier au cas par cas. Que ce soit pour Grégorini, Abardonado, Bigné et Meslin. Puis, on a su attirer quelques joueurs libres ou en prêt gratuit comme Laslandes, Dié et Echouafni. Pourtant, notre budget est resté scotché à la 19e place. Un mental inoxydable, une générosité permanente dans l'effort et une certaine qualité de jeu à domicile.
Les vertus de votre équipe, tant louées l'an passé, sont-elles toujours les mêmes ?
Je pense. A domicile, notre public est très content de nos prestations. Aucun adversaire n'a encore marqué un but chez nous. Car les deux buts inscrits par Ajaccio ont été marqués par nous-mêmes. J'espère que cette série va se poursuivre. En revanche, nous sommes un peu frustrés par les deux points perdus à Rennes et le point que l'on nous a volé à Marseille (penalty concédé dans le temps additionnel). Donc, il est temps maintenant de récupérer ces trois points. Tant pis pour Bordeaux.
En tant que girondin de coeur, n'êtes-vous pas navré de voir votre ancien club se débattre en fin de classement ?
Bien sûr, je suis triste car c'est un club où j'ai passé vingt et un ans de ma vie. Une période exceptionnelle dont je ne retiens que les bons souvenirs. Ceci dit, chacun a ses problèmes. J'ai les miens à Nice, même s'ils ne sont pas nombreux. Mais je suis persuadé que les Girondins pourront résoudre les leurs.
Bordeaux, 16e avec 11 points en 10 matches. Cela ne fait-il pas désordre ?
Pour un club qui fait partie des plus gros budgets de Ligue 1, c'est étonnant. Néanmoins, je constate qu'il y a toujours de très bons joueurs dans cette équipe, avec les Ramé, Jurietti, Caneira, Feindouno, Darcheville, Costa. Ces garçons, j'aimerais bien les avoir à Nice. Pour autant, je suis sûr qu'ils vont refaire surface. C'est obligé. Sinon, c'est à ne plus rien comprendre.
Quand on sait les difficultés d'adaptation d'un étranger, nouveau pays, nouvelle langue, nouveau football, trouvez-vous logique de recruter six des sept nouvelles têtes hors de France ?
Je ne suis pas là pour commenter le recrutement des autres. Cela dit, j'ai ma petite idée derrière la tête. Depuis quelque temps, j'observe le recrutement de beaucoup de joueurs étrangers. Et à Bordeaux, ils ont toujours des origines portugaises, brésiliennes et espagnoles. Cela m'étonne, en effet. Mais ce que je regrette le plus, et je suis bien placé pour en parler, c'est l'absence de jeunes du centre de formation chez les pros depuis plusieurs saisons. Je ne comprends pas trop. Même si je ne suis pas à l'intérieur pour pouvoir juger.
Les Girondins que vous recevez demain sont au plus mal. Est-ce une bonne ou une mauvaise chose ?
Un peu des deux. Pour une fois, je réponds de façon diplomatique. Cela peut être une bonne chose car ils sont dans le doute et ont du mal à se trouver. A l'inverse, si c'est une équipe de caractère, elle est obligée de réagir, de se révolter car cela ne fait jamais plaisir d'être sifflé par ses propres supporters. Moi, j'aurais préféré que les Bordelais s'imposent devant Toulouse. Nous aurions eu ainsi plus de chances de les battre.
La saison passée, les deux matches vous ont laissé frustration et amertume. N'avez-vous pas une revanche à prendre ?
Le 4-0 de Chaban-Delmas avec le but annulé de Kaba Diawara qui était valide et l'égalisation de Chamakh dans le temps additionnel au retour, nous ne l'avons toujours pas digéré. Néanmoins, cela ne nous a pas empêchés d'atteindre notre objectif et, a contrario, malgré ce nul, Bordeaux n'a pu se qualifier en Ligue des champions. Cette année, les données sont différentes. Nice a mûri et a pris de l'expérience. Nice-Bordeaux, c'est un grand match. Pour moi, mais aussi pour Laslandes et Everson (1). On attend ce rendez-vous avec impatience. Pas pour se venger car il n'y a rien à venger. Même si ce club m'a licencié en 98 après vingt et un ans de service. Mais pour gagner.
Quitte à enfoncer les Girondins ?
Dans ce milieu, nous sommes obligés d'être impitoyables. Si nous avons l'occasion de pouvoir gagner avec un score fleuve, nous profiterons de chaque opportunité. Le professionnalisme doit rester honnête, correct et, par conséquent, impitoyable.
(1) Everson a fréquenté le centre de formation des Girondins à l'époque où Rohr
en était le responsable. Mais le joueur n'avait pas été conservé.