Roger Ricort:

"Je suis fier de ce que le club réalise"

 

Extrait

 

 

Il paraît que votre principal souci provient de vos dents de sagesse...

Non, on ne va pas parler de ça....... Par contre c'est vrai que c'est assez pénible, surtout en ce moment.

Rentrons dans le vif du sujet: comment expliquez vous que le marché hivernal ne s'emballe pas ?

Beaucoup de clubs recherchent les mêmes joueurs au même poste. Ce sont souvent des attaquants et comme les « tueurs » de surface ne courent pas les rues, il y a une certaine prudence sur le marché qui s'installe. Personne ne veut faire n'importe quoi. Je peux vous dire qu'aujourd'hui, cela devient vraiment difficile de réussir un bon coup en décembre. Ce sont donc les aléas qui permettent d'emballer le marché. En juillet, il y a plus d'animation car les clubs ont bien préparé leur affaire. En décembre, c'est davantage les circonstances qui décident...

L'arrivée de Sinama-Pongolle n'est-elle plus d'actualité ?

Non, la décision est simplement reportée à lundi. Par contre, nous ne tarderons pas plus à son sujet, ni sans doute à propos d'un renfort. Nous cherchons à ce qu'une recrue soit présente pour le 11 janvier face à Sochaux. Il faut éviter de prendre quelqu'un le jour où nos deux Africains seront sur le retour (rire)...

Quelle est la solution de repli ?

Vous savez, il peut à tout moment s'en présenter une. Tous les matins, il y a une opportunité qu'on ne soupçonne pas. À nous de l'étudier et de la saisir en dehors des dossiers en cours.

Y-a-t-il réellement un besoin offensif ou est-il possible de s'en passer ?

Il y a trois raisons qui nous poussent à ne pas être pressés. La première réside dans le fait que nous voulons prendre un véritable plus. Un garçon susceptible d'opposer une réelle concurrence le jour où Koné et Camara reviendront de la CAN. La deuxième est peut-être de se dire que nous allons affronter Sochaux, Nantes, Bordeaux et Saint-Étienne, autant d'équipes qui seront également handicapés par des départs. La troisième passe par la possibilité donnée à certains joueurs de saisir la chance de montrer ce dont ils sont capables. La victoire face à Toulouse nous a renforcés dans ce championnat. Nous n'avons pas de pression véritable sur ce marché des transferts.

Nous sentons qu'il y a une volonté de ne pas faire n'importe quoi ?

Tout à fait.

Au niveau des départs, il n'y a pas non plus de grosses surprises...

Chez nous, il n'y en a pas, tout simplement.

Vous avez déclaré dernièrement que la rumeur du départ de Sammy Traoré était de la pure spéculation. N'y a-t-il vraiment pas eu de contacts ?

Non. C'est du n'importe quoi. Certaines fois, vous les journalistes, vous n'imaginez pas à quel point ce type de rumeurs est dur à corriger après. Je n'aime pas que les choses soient mals interprétées. Nous avons décidé un huis-clos contre Cannes au Ray. Sammy se met d'accord avec le coach pour ne pas forcer. Le lendemain, nous lisons que c'est peut-être en vue d'un départ. J'ai passé la journée qui suit à répondre que ce n'était pas le cas...

Des pistes comme celle menant à David Bellion pourraient-elles être réactualisées ?

C'est un jeune au profil intéressant. Nous allons creuser cette éventualité. C'est un garçon qui a été blessé, puis prêté et qui traverse une période délicate. Nous pouvons le relancer. De plus, il est originaire d'ici et son temps d'adaptation peut être moins long que pour d'autres. Même si son parcours reste assez moyen depuis deux ans, il fait effectivement partie des jeunes que nous avons à l'oeil. En plus, il veut partir...

Finalement, il n'y a pour l'instant que le retour de Kamel Larbi comme mouvement...

Oui, d'ailleurs, à travers lui, il est intéressant d'ouvrir le dossier sur le centre de formation. Nous allons mettre en place un projet et il est utile de se poser des questions sur ce qui se fait à ce niveau.

Son échec à Lorient est symptomatique des difficultés des jeunes à passer le cap du professionnalisme...

C'est exactement ça. Je suis même peiné que nous en soyons presque à « payer » pour nous séparer de jeunes champions de France dans leur catégorie. C'est ambigu comme contexte. Il y a un problème quelque part.

Pour quelles raisons des garçons comme Padovani ou Scaramozzino, pourtant internationaux chez les jeunes, ne percent-ils pas ?

C'est trop difficile d'étaler dans la presse les raisons d'un échec. Le club a certaines responsabilités, mais il y a peut-être aussi des ingrédients incontournables pour accéder au haut niveau, qu'ils ne possèdent pas. J'ai l'impression que dès qu'ils se retrouvent livrés à eux-mêmes et qu'il y a une certaine forme de compétition, ils ne trouvent pas les ressources pour faire face à l'adversité.

Pourquoi n'y a-t-il pas de réelles passerelles entre la CFA et l'équipe pro ?

Nous devons adapter une politique sportive une fois pour toute. Je ne veux pas parler de ce qui s'est passé avant. Aujourd'hui, nous travaillons d'une certaine façon et je suis même optimiste pour la suite. Je suis certain que nous sommes dans le vrai, mais ça prendra du temps.

Avec le Grand Stade, l'enjeu de demain n'est-il pas de réussir justement à trouver de nouvelles ressources avec son centre de formation ?

C'est beaucoup plus complexe que ça. J'aime bien les comparatifs. En 97, nous avons gagné la coupe de France, mais nous avons enchaîné cinq saisons en L2. Mon rêve est d'en gagner une cette année et de rester les cinq suivantes en L1, dans un grand stade et avec des jeunes de chez nous. La réussite, c'est un ensemble.
 

Messi, Iniesta... Comment des équipes comme le Barça y arrivent ?

Ils achètent très cher, des jeunes très tôt.

Et très bons...

Oui, c'est vrai... Nous connaissons nos prochains dossiers. Cette saison, nous avons réussi à conserver une base et nous y avons ajouté 8 nouveaux joueurs et peut-être un neuvième bientôt. Nous ne pouvons agir toujours de cette façon et élever chaque année le niveau de l'équipe. L'objectif est d'en prendre seulement trois l'an prochain, tout en conservant encore la base actuelle. C'est à ce moment que nous devrons accentuer les efforts au niveau des jeunes pour compléter l'effectif. Économiquement, c'est indispensable.

Côté installation, peut-on parler d'amélioration au niveau des conditions de travail ?

Oui, hormis le vestiaire pro et le secteur médical, où l'on ne peut pas faire grand-chose, car nous n'allons pas révolutionner l'édifice 18 mois avant un départ, le siège du club est agréable à vivre. Nous commençons réellement à bénéficier de surfaces dignes d'un club pro. Il y a quasiment 4 terrains pour le centre et les pros. Les progrès sont énormes, mais nous restons encore en retard par rapport aux autres clubs de L1. Je le répète, il y a beaucoup de progrès effectués depuis quelque temps. Simplement, nous ne faisons que rattraper le retard accumulé pendant des années.

Votre entente avec Antonetti est aussi importante pour améliorer le quotidien...

Oui, car nous sommes sur la même longueur d'onde. Avec Fred, il est facile d'avoir les mêmes idées pour installer le club durablement en L1. Je pense que les gens ne se rendent pas compte de ce que ça veut dire d'être dans les dix meilleurs du championnat. Je les comprends car il nous manque les 5, 6 points qui nous permettraient d'être plus crédible, mais c'est parfois difficile à entendre...

Souffrez-vous d'un certain manque de reconnaissance par rapport au travail que vous fournissez ?

Nous ne devons pas chercher constamment des excuses. Mais parfois, j'entends des choses surréalistes. Lorsque des supporters me glissent :« Roger, il faut que nous soyons dans les cinq premiers... » Je les écoute puis leur réponds: « Vous voulez me faire plaisir écrivez- moi le nom des grosses écuries de ce championnat ? » À 9, ils s'arrêtent et sur le papier, il n'y a toujours pas le Gym. Il ne sert à rien de finir 6e la première année et échouer les années suivantes. L'objectif est d'intégrer le top 8 durablement. Nous avançons dans ce sens. Le budget est passé de 16 à 27 M d'euros en trois ans. Pour la première fois dans l'histoire du club, les actionnaires ont investi 2,5 M d'euros sur un joueur. C'est énorme. Demain, nous viserons peut-être des hommes à des postes clefs qui vaudront le double. C'est ce travail qu'il faut mesurer aussi. Il y a une évolution, même si le décalage existe entre ce que nous produisons et ce que nous pouvons produire.

À un moment donné, les critiques vous ont-elles blessé ?

Non, elles ne me blessent pas. Je suis fier de ce que le club réalise. Aujourd'hui, nous sommes en discussion avec les Reds de Liverpool. Il y a encore trois ans, nous aurions cru à une mauvaise blague. Rien que pour cette raison, nous méritons un certain respect. Par contre, je profite de l'occasion pour dire qu'il m'est arrivé d'être touché par certaines remarques sur le site Internet même du club. Dans cet endroit qui nous appartient, on s'amuse à insulter le président, le directeur sportif ou l'entraîneur. Je me demande si l'on est vraiment supporter du Gym quand on fait ça. Je veux bien que l'on émette des critiques, mais pas en se cachant derrière un pseudonyme. Il nous arrive de parler avec des supporters au Parc des Sports et croyez-moi nous ne sommes pas forcément toujours d'accord. Mais c'est franc. Vous imaginez que l'on a attaqué le président sur sa religion ! Je me suis demandé ce qu'il avait fait pour mériter ça... La route est difficile et nous avons besoin de tout le monde. Pour le Grand Stade, nous aurons besoin de 12 000 supporters derrière les deux buts. C'est un rêve et une ambition, mais si c'est pour que la moitié, au moindre dérapage, se mette à conspuer, je préfère arrêter de suite. Les critiques, même les plus virulentes sur des mauvais choix ne me font pas peur. Ce sont les attaques gratuites et personnelles qui me gênent davantage. Il faut que les supporters évoluent aussi avec le club. Lorsque le président est élu au conseil d'administration de la Ligue, il porte haut les couleurs de la ville et du club. Il montre que nous existons. Il le fait pour tous les Niçois, pas pour qu'on crache sur sa personne...

Avec du recul, n'est-ce pas le lot de tous les clubs ?

Oui, aussi... Mais si nous cultivons notre identité dans certains domaines, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas le faire dans d'autres.

Pour autant, vous avez préféré rester dans l'ombre et ne pas répondre aux attaques...

Je vous rassure, nous sommes aussi les premiers déçus en certaines occasions. À un moment, si quelqu'un avait filé les clefs au coach, il serait presque parti. On ne s'est pas trompé avec lui. C'est une certitude. Partout où il est passé, il a réussi. Il a toujours fait du bon boulot, mais sur la durée. Nous avons voulu bâtir à partir d'un projet de trois ans. L'objectif est d'être dans la peau d'équipes comme Lens ou Bordeaux dans ce laps de temps. Il veut et il peut relever ce défi. Je pense aussi que ce groupe est apte à le suivre dans cette voie. Cependant le chemin est long. Nous n'avions pas anticipé l'arrêt de José Cobos. On se rend compte qu'il a laissé un grand vide. Je me permets de lui rendre hommage à cette occasion. Il était réellement l'un des garants de cette aventure niçoise. La transition s'est donc faite plus lentement. Nous demandons progressivement aux joueurs de s'impliquer davantage. Un patron, on ne l'invente pas. Il se construit au quotidien. Le coach l'explique tous les jours qu'on attend plus d'eux. Cela se fait naturellement. Quand Baga parle à l'arbitre, il faut que Pancho vienne l'enlever du milieu. Lorsque l'équipe est en train de se préparer, c'est Cédric, Balmont, Chouf ou Rool qui doivent tour à tour impulser un état d'esprit de vainqueur. Chacun a quelque chose à faire pour entretenir cette flamme. Quand on parle de mentalité, je pense à Valencony. Il a suivi l'épopée depuis 2002 sur le banc des remplaçants et personne ne l'a jamais entendu. Son amour du club a été plus fort que tout. Il faut que l'on arrive à ce que l'adversaire ne puisse plus toucher Marama et Baky au Ray sans craindre la foudre de l'équipe. Mais tout ça, ça se prépare... Il n'y a que le temps qui permet d'y arriver. Nous assistons à la naissance d'un groupe et c'est pour cette raison qu'il ne sert pas à grand-chose de commenter son évolution sans arrêt.

Inversement, n'est-il pas également facile de tomber dans une certaine paranoïa ?

Non, car nous restons conscients de ce qu'il y a à améliorer chez nous aussi. La réflexion est interne. Après Metz, nous n'étions pas très fiers. Vous n'avez vu personne s'en prendre à l'arbitre ou évoquer les pressions du public...
 

C'est l'une des premières fois que vous avez réellement les mains libres, au niveau sportif. Comment vivez-vous la pression ?

Je la vis à 100%. J'aime Nice et j'assume mon rôle. Nous ne faisons pas de complexe et je suis persuadé qu'à terme, le club peut être une équipe qui compte dans ce championnat.

Et la nouvelle médiatisation ?

On doit être meilleur. Il nous est arrivé de cafouiller en certaines occasions.

A-t-elle pu accentuer certaines rancunes à votre égard ?

Non. Vous savez, contrairement à ce que l'on croit, je n'ai pas tant d'ennemis que ça (rire) ! Avec le président, nous avons tenu le même discours et nous sommes toujours restés sur la même longueur d'onde au sujet du Gym. Nous avons toujours crié que le club faisait fausse route. Ce n'est pas de ma faute si au final, on a toujours dit que Maurice était plus diplomate. Je n'y peux rien. Je ne contrôle pas cette image. La seule chose que je sais : c'est que j'ai 46 ans, que je suis marié depuis 23 ans, que j'ai deux enfants et que j'ai un casier judiciaire vierge. Pardessus tout, j'aime Nice. Bien sûr, je ne serai jamais quelqu'un de lisse. Mais jamais vous n'entendrez dire que je suis austère ou mal élevé. Médiatiquement, on pense peut-être que je suis une personne conflictuelle, mais c'est davantage dû à un passé où je ne pouvais laisser mourir le club que j'aime. Nous étions dans une fourmilière. Il fallait y mettre un coup de pied. Il y a quelqu'un qui l'a fait. Contre toute attente, nous avons trouvé que des fourmis rouges qui continuaient à tout ronger... Nous savions qu'à tout moment, l'édifice pouvait s'écrouler. Le club est passé à deux doigts d'une mort certaine. On ne veut pas revivre ça. L'épopée de 2002 avec Gernot est inoubliable. Mais il ne faut pas oublier qu'en avril 2005, le sauvetage ne tint qu'à un pied ou un arrêt. Le changement aujourd'hui réside dans la bonne gestion du club. C'est un pas important. Le deuxième est d'arriver à ancrer les résultats sportifs dans une certaine continuité.

Qu'est-ce que vous regrettez d'avoir fait depuis ta prise de fonction ?

Rien de particulier.

Est-ce que vous jugez cela comme une première victoire ?

Mon rôle est d'accompagner le présent et de préparer le futur. Aujourd'hui, je suis fier des postes que nous avons créés dans l'encadrement du club. C'est une garantie de solidité. En ce qui concerne demain, je me satisfais déjà des commentaires que j'entends ici ou là, sur le sérieux de la structure et sur la volonté de joueurs de venir à Nice...


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