Conseil
municipal sur fond d'affaires
(extrait )
Le projet du grand stade sera absent des délibérations du conseil municipal
qui débute ce matin à 8 h 30. Les dossiers le concernant ont en effet été
retirés de l'ordre du jour en raison de la procédure judiciaire en cours.
Absent, il sera pourtant au cœur des débats mais pour des raisons autres que
sportives.
En effet, celui qui a été qualifié de « chaudron », pour son concept
architectural, fait de plus en plus figure de marmite infernale. Une marmite
autour de laquelle la Justice et la police s'agitent depuis que l'affaire a
éclaté voilà une semaine.
Depuis que le directeur général des services de la Ville et de la communauté
d'agglomération, Michel Vialatte, l'adjoint aux sports, Bernard Orengo, le
responsable du nettoiement, René Daolio, le dirigeant de la société A3COM,
Philippe Pariset, ainsi qu'un homme d'affaires de l'Essonne, Pierre Besrest, ont
été mis en examen et écroués (1).
Et la liste n'est pas close puisqu'une sixième arrestation a eu lieu avant-hier,
celle d'un dirigeant de société.
Tous sont soupçonnés d'avoir mis en place un système organisé de fraude et de
trucage des marchés publics.
Au cœur de ces incriminations : l'assistance à maitrise d'ouvrage du grand stade
; un marché attribué à la société A3COM dans des conditions suspectes pour la
Justice. Soulignons que les conditions d'attribution de ce marché viennent
également d'être attaquées par la préfecture devant le tribunal administratif
(voir nos informations départementales).
L'opposition veut en découdre...
Ce matin, dans la salle du conseil municipal, le débat s'annonce houleux.
L'opposition ne cache pas son intention d'en découdre et de demander des comptes
à propos d'une affaire qui éclabousse la commune.
« On ne s'exprimera pas sur la responsabilité juridique du maire, c'est aux
tribunaux de se prononcer sur ce point. En revanche, la responsabilité politique
de Jacques Peyrat est clairement engagée. N'est-ce pas lui qui a recruté Michel
Vialatte par deux fois ? », interroge le chef de file de la gauche, Patrick
Mottard.
« Ces derniers temps, le maire a fait preuve de beaucoup d'arrogance. Et en
décembre dernier, il se portait publiquement garant de la probité de son
directeur général des services !
« Nous allons mettre le maire sous une forme de tutelle politique sévère et on
prendra l'opinion publique à témoin dès qu'il y aura doute sur la transparence
des affaires municipales ».
Pour sa part, Jacques Peyrat affirme qu'il affrontera « dans la sérénité » le
débat explosif qui s'annonce aujourd'hui, en ajoutant que les « coupables seront
sanctionnés ». « Les hommes qui sont aujourd'hui incrimés ne sont pas et ne
seront pas protégés par la Ville. La municipalité leur demandera raison des
torts qu'ils lui font, et à travers elle aux Niçoises et aux Niçois. »
Cette séance du conseil municipal sera en tout cas sous haute tension.
Marchés publics de Nice : le préfet saisit la justice administrative
Première conséquence de l'affaire de corruption présumée : un double recours
en annulation et suspension du marché d'assistance à maitrise d'ouvrage a été
déposé par la préfecture
L'affaire de corruption frappant les marchés publics de la Ville de Nice va
connaitre un premier développement devant le tribunal administratif. La
préfecture a saisi mardi soir cette juridiction afin d'obtenir l'annulation et
en tout premier lieu la suspension du marché d'assistance à maitrise d'ouvrage
du grand stade de Nice.
Cet acte délimite la première phase de ce dossier qui a débuté le 18 mars à Nice
par l'interpellation de l'adjoint délégué aux sports, Bernard Orengo puis du
directeur général des services de la Ville et de la CANCA (Communauté
d'agglomération Nice-Côte d'Azur) Michel Vialatte et d'un responsable du
nettoiement, René Daolio.
Les trois hommes soupçonnés d'avoir mis en place un système organisé de fraude
et de trucage des marchés publics avaient été mis en examen à l'issue de leur
garde à vue. Et seul Bernard Orengo avait échappé au placement sous mandat de
dépôt en raison de son état de santé.
L'enquête qui reposait alors essentiellement sur des écoutes téléphoniques avait
toutefois besoin d'être étayée. Des perquisitions avaient donc été parallèlement
déclenchées afin de saisir des dossiers et des documents.
Une sixième interpellation à
Reims
L'analyse de ces pièces est d'ailleurs actuellement en cours.
Dans ce premier coup de filet, la justice avait également ciblé ceux qu'elle
soupçonnait d'appartenir à l'équipe extérieure du système. Le marché
d'assistance à la maitrise d'ouvrage du grand stade de Nice, obtenu par la
société marseillaise A3com, désignait son directeur, Philippe Pariset. Lequel
avait été interpellé tout comme Pierre Besrest, un homme d'affaires qui
apparaissait, selon les policiers, être l'interlocuteur privilégié du trio
niçois.
Ces deux intervenants extérieurs à la mairie avaient été également mis en examen
et écroués. Cette organisation soupçonnée de rechercher le versement de
commissions était composée de cinq acteurs jusqu'à mardi dernier.
Les enquêteurs ont en effet interpellé à Reims un homme d'une cinquantaine
d'années, proche de Pierre Besrest. Ce dernier qui a été transféré, hier soir à
Nice, devrait être entendu aujourd'hui par le doyen des juges d'instruction
chargé du dossier, Christian Guéry.
Le procureur de la République avait souligné jeudi dernier deux points capitaux
dans ce dossier lourd de conséquences : tout d'abord l'intervention rapide de la
justice avait permis d'éviter la pollution des marchés publics. Le système
frauduleux était seulement en phase de mise en place. D'autre part la justice
estimait que seul l'enrichissement personnel avait guidé les différents acteurs
de ce dossier politico-financier.
Une contamination indéfinie
Néanmoins, le lancement de la procédure judiciaire fait planer de lourdes
incertitudes sur les autres grands projets de la Ville : tramway, nouvelle
mairie... Des incertitudes qui ne manqueront pas d'être soulevées aujourd'hui au
cours d'un conseil municipal qui s'annonce tendu. (1)
Si la fraude est démontrée, quel
est le périmètre précis de la contamination ?
On peut désormais en mesurer les conséquences sur le dossier du grand stade du
Ray. L'acte fondateur du projet, le marché de l'assistance à la maitrise
d'ouvrage est confronté depuis hier à un procès qui risque de l'engloutir.
Les services du contrôle de la légalité de la préfecture des Alpes-Maritimes ont
donc saisi le tribunal administratif pour en obtenir l'annulation. Une procédure
connexe permettant sa suspension dans l'urgence a été également lancée.
Si les juges administratifs retiennent les irrégularités pointées par la
préfecture (non-respect du règlement d'attribution) le marché sera stoppé dans
quelques jours, puis annulé dans un délai plus long.
Le sénateur-maire de Nice avait d'ailleurs reçu un courrier lui demandant d'agir
très rapidement. La préfecture nous a indiqué que cette expédition avait été
effectuée vendredi dernier. Cependant la Ville de Nice n'ayant pas choisi, entre
temps, la voie de l'annulation, c'est la préfecture qui a porté le premier coup.
Le marché public qui se trouve à la source de la procédure judiciaire devient
très logiquement le premier à passer dans le contentieux objectif et
administratif. Le cas sera-t-il isolé ?
(1) A l'exception de Bernard Orengo, resté en liberté en raison de son état de
santé, mais sous un strict contrôle judiciaire.