Poussin Meslin:
"J'ai beaucoup de choses à faire ici..."
Extrait
Avant tout, comment se passe la rééducation ?
C'est encore tout frais
puisque je me suis fait opérer vendredi dernier. J'étais un peu inquiet parce
qu'on ne sait jamais réellement ce qu'il y a avant « d'ouvrir», mais
heureusement, il y avait seulement un petit bout de cartilage qui se baladait
dans le genou. Comme je m'étais déjà fait opérer à cet endroit,
j'appréhendais... mais tout s'est bien passé. Place maintenant à la rééducation,
je pars pour Saint-Raphaël lundi. On m'a donné deux-trois semaines de travail
avant de faire un point sur ma reprise, mais j'espère pourvoir recourir avant un
mois.
Tu commences à avoir
l'habitude...
Malheureusement ! C'est
vrai que fréquenter les centres de rééducation est une mauvaise habitude que
j'ai prise, mais je fais avec...
Le fait d'avoir une
certaine « expérience » dans ce domaine te fait-il aborder les différentes
phases de la rééducation avec plus de philosophie ?
C'est clair. Je peux même avancer sans trop me mouiller que je dois être un des joueurs les plus «expérimentés » de Ligue 1 dans le domaine médical, et plus précisément celui du genou... (rires) Plus sérieusement, il est certain que les pépins qui me sont arrivés par le passé me permettent de mieux gérer ma situation actuelle. Psychologiquement, c'est très difficile de rester éloigné des terrains pour une longue durée, mais je me raccroche au fait que je suis toujours revenu. Je tiens le coup donc, et je bosse.
Suite à une longue indisponibilité, les joueurs évoquent souvent une phase de dépression. As tu vécu cette période ?
Je n'irai pas jusque-là.
J'ai vécu des moments difficiles, dire que j'en sois arrivé à un tel point.
Après la première intervention, lorsque j'ai appris que je devrais
repasser sur le «billard », j'ai eu du mal à l'accepter. J'ai traversé une
période délicate où je me suis posé pas mal de questions. L'humain est fait
comme ça et parfois on craque. Mais j'ai rapidement réussi à reprendre le dessus
en me disant que ce n'était pas la première fois que je passais par là et que
j'avais toujours su rebondir.
N'est-ce pas également dû au fait de se retrouver du jour au lendemain coupé des terrains, de la médiatisation... Tout simplement redevenu presque un anonyme...
A ce niveau-là, je n'ai jamais eu trop d'illusions. Une fois éloigné des terrains, on est éloigné de tout. Même si c'est dommage, cela fait partie des règles du jeu. C'est le milieu qui veut ça. Mais malgré tout, il reste des personnes bien présentes et ce sont elles qui comptent...
Tous tes pépins t'auront donc au moins permis de faire le tri dans ton entourage...
C'est clair. On fait
rapidement le tour des gens qui restent présents dans ces moments de galère.
Avec mes blessures, j'ai même eu la possibilité de faire le tri plusieurs fois
(rires). Mais je vous rassure, dès que l'on refoule les pelouses de Ligue 1, on
retrouve rapidement tous ces « amis» que l'on a perdus de vue... (rires)
Les joueurs gravement
blessés passent d'un monde surfait qu'est celui du football professionnel à la
réalité des hôpitaux et des centres de rééducation. Peut-on dire que toutes tes
galères t'ont fait relativiser certaines choses de la vie ?
Bien sûr ! J'en ai
d'ailleurs des exemples dans mon entourage. Il y a des choses vraiment plus
graves dans la vie, mais c'est vrai qu'au départ, lorsque l'on est sous le coup
de la blessure, on focalise sur sa carrière. C'est un moment important car cela
peut tout remettre en cause. On pense à des exemples de joueurs qui ne sont
jamais parvenus à revenir à leur meilleur niveau. Dans ce cas, il s'agit d'un
métier que l'on ne peut plus exercer. Mais après, il est clair que l'on replace
rapidement les choses dans leur contexte, on ne peut pas parler de handicap
comme cela arrive à de nombreuses personnes. Il s'agit simplement d'une blessure
que l'on soigne.
Quand on est habitué
à penser, manger et dormir football, comment s'occupe-t-on pendant de longs mois
?
C'est difficile parce que le football rythme littéralement notre vie. En plus, on a souvent une mobilité réduite les premiers temps, donc ça favorise plus le fait de rester à la maison et de gamberger, de se poser plein de questions sur la situation dans la quelle on est. Mais personnellement, dès que la rééducation commence, jer me focalise dessus en fixant des objectifs. c'est une motivation permanente, il faut travailler constamment, franchir des paliers, étape après étape, pour retrouver le terrain le plus vite possible. C'est une obseesion qui remplace le ballon dans ma tête.
En n'étant plus au quotidien avec le groupe, quelles relations as tu gardés avec tes coéquipiers et les membres du club?
Je reçois des coups de fil régulièrement et ça me fait vraiment plaisir. Avoir le soutien du président, de l'entraîneur et des joueurs est une source de motivation supplémentaire. Cela permet d'être un peu raccroché à la vie du groupe. J'en profite également pour remercier mes amis de leur présence, notamment Patrice Evra qui est toujours là pour moi. C'est important de pouvoir compter sur des personnes comme ça.
Certains joueurs ne
se remettent jamais d'une grave blessure. Toi, tu es revenu à chaque fois encore
plus fort. Comment l'expliques-tu ?
C'est difficile de savoir réellement, peut-être que j'ai une force qui me permet de passer au-dessus de tout ça. Quels que soient les problèmes que je rencontre, j'y crois toujours. Et après avoir eu deux ligaments croisés, ce n'est pas un petit truc au ménisque qui va m'arrêter... (rires)
Psychologiquement, comment as-tu vécu le fait de voir le club recruter Agali et Jankauskas ?
Beaucoup de joueurs
offensifs sont partis à l'intersaison, c'était donc logique de
recruter dans ce secteur de jeu. À mon niveau, je vois la concurrence comme
quelque chose de positif. C'est motivant, cela permet de se remettre en
question. C'est une émulation permanente. Et puis après, ce sont les meilleurs
qui jouent...
Habitué à jouer la saison dernière avec un schéma à une ou deux pointes, Gemot Rohr évolue désormais plus souvent avec trois, voire quatre joueurs offensifs. Que penses-tu de ces nouveaux systèmes ?
Je crois que l'équipe a prouvé ces dernières semaines que cela pouvait bien marcher comme ça. Les saisons précédentes, le coach avait opté pour des systèmes plus défensifs et c'est clair que pour un attaquant, le changement ne peut être que positif. Avec un bloc équipe plus haut, on touche plus souvent le ballon et l'on se trouve plus régulièrement en position de marquer.
Cela te laisse également entrevoir de nouvelles opportunités pour ton retour avec la possibilité de jouer en pointe, en soutien de l'avant-centre ou décalé sur un côté...
C'est vrai même si je ne suis pas trop un homme de couloir. Le poste où je me sens le mieux et où j'ai le plus apporté à l'équipe, c'est en tant que deuxième attaquant, avec Diawara et Laslandes.
Dans ta position, comment as-tu vécu l'extraordinaire derby à Monaco ?
J'étais au stade, et je ne vais pas vous mentir, je n'imaginais vraiment pas un tel scénario. Comme tout le monde, je pensais même que cela risquait de très mal se passer quand les buts ont commencé à s'enchaîner. Et puis le reste se passe de commentaire... l'équipe est tout simplement entrée dans la légende ! Sinon j'avais juste une petite parenthèse à faire par rapport à cette rencontre. J'ai été un peu déçu de l'attitude contre Pat Evra. Il était au club, a participé activement à la montée et je trouve dommage d'en arriver là maintenant. Enfin voilà, je tenais à le dire, parenthèse refermée.
Vois-tu toujours ton avenir en rouge et noir ?
Bien sûr, j'ai encore un an et demi de contrat. C'est au Gym que je me suis révélé au haut niveau et j'ai encore beaucoup de choses à faire ici. Dans ma tête, je suis nissart à 200 %.