Nice-PSG, une affaire d'hommes
Extrait France Football
Le vrai antagonisme, c'est
entre Nice et Monaco », rappelle Maurice Serrus, défenseur du Gym entre 1963 et
1971, et qui a affronté le PSG... seulement avec Strasbourg ! N'empêche, les
confrontations au Ray entre Niçois et Parisiens ont toujours eu du tempérament.
Et ce dès la première, le 27 août 1974, Au cours de cette sixième journée, le
PSG de Dahleb, Dogliani, M'Pelé et Pantelic s'incline 4-2, avec un doublé de
Molitor côté niçois. Le club entraîné par Just Fontaine peut s'en mordre les
doigts : un but refusé injustement avant que, sur la contre-attaque, Nice ne
marque malgré un hors-jeu évident ! Paris dégage une meilleure impression
d'ensemble, mais perd.
Rebelote la saison
suivante, cette fois en toute logique. Les Aiglons, en dominant Paris (2-1),
conquièrent leur sixième victoire en neuf rencontres de Championnat. Sur la
pelouse, onze des éléments niçois utilisés ont été sélectionnés en équipe de
France ou de Yougoslavie, de Baratelli à Douis, de Guillou à Musemic. Et encore,
Jean-Noël Huck était forfait et Roger Jouve est sorti à la 20e pour éviter une
élongation à la
cuisse droite plus sérieuse. Le Portugais Humberto sauvera l'honneur parisien,
Robert Wurtz officiant au sifflet. Il faudra attendre le 17 février 1978 pour
que la capitale s'impose enfin. Un match enlevé, spectaculaire, remporté 3-2. La
première des sept victoires au Ray. La saison suivante, Paris s'impose de
nouveau, plus largement encore (1-3). Nice se reprend dans la foulée (3-0, son
plus net succès), puis les deux équipes se neutralisent trois ans de suite, le
0-0 du 30 août 1985 se révélant particulièrement houleux. La partie de l'an
passé, avec la victoire sur le fil du PSG (1-2), a aussi été intensément virile.
(4 J'étais dans les tribunes et j'avais été choqué par les incidents ayant
précédé le match », se souvient Maurice Serrus, jusqu'à peu président de la
Fédération sportive de jorky-ball.
24 points de suture pour Cobos!
L'an passé ? Un miracle signé de la bande à Vahid Halilhodzic. Mené dès la première mi-temps par un but de Laslandes, le PSG passe au bord du K.-0. à la 54è. Meslin s'échappe et Alonzo, pour l'empêcher de marquer, le ceinture en dehors de la surface. Le gardien est expulsé pour ce geste d'antijeu. A neuf minutes de la fin, un corner de Fiorèse atterrit sur la tête de Pierre-Fanfan. But.
Six minutes plus tard, l'Argentin Sorin catapulte de la tête le centre de son capitaine Fred Début au fond des filets de Grégorini. C'était le 10 avril 2004. Paris, 17e le 30 août, grimpait alors à la 3e place grâce à sa force mentale, concrétisée par 23 matches sans défaite. « Nous avons franchi un grand pas vers la Ligue des champions», se félicitait Déhu.
Drôle de match, en vérité, qui a commencé de façon singulière : à la 5°, le capitaine niçois José Cobos, qui a joué quatre saisons au PSG, est au tapis. Le défenseur est K.-0. après un choc à la tête avec son partenaire, parisien d'origine, Noé Pamarot, aujourd'hui àTottenham. Pamarot sera recousu dans le vestiaire après la rencontre (6 points de suture). La blessure de Cobos, elle, nécessite l'intervention d'un chirurgien plastique, abonné au stade du Ray : il lui posera 24 points de suture !
Marco Simone, ex-du PSG, n'est pas sur le banc : apprenant la veille qu'il n'était pas titulaire, il a demandé à Gernot Rohr de ne pas figurer sur la feuille de match. Diva, quand tu nous tiens !
Pas de Cherrad non plus,
alors porté disparu, Pourtant, l'entraîneur du Gym était diablement motivé : «
Le PSG est un gros qu'on aimerait bien épingler, parce que
c'est Paris et qu'ils sont parfois un peu suffisants », disait-il. Raté ! Nul
doute que les motivations de Rohr sont identiques cette année.
Quant aux Parisiens ? En 2003, ils avaient terminé à neuf. Nyarko avait récolté un second carton jaune à la 87" ; il sera rejoint au vestiaire par son entraîneur, Luis Fernandez, à la 91e. Lionel Letizi avait néanmoins réussi à conserver son but inviolé (0-0). Clin d'oeil : celui qui a été formé à Nice, notamment par Pierre Alonzo, le papa de sa doublure Jérôme, célébrera dimanche son 300è match en L 1. Alonzo et Letizi appartiennent aux 19 joueurs ayant évolué à Nice et à Paris.
Parmi eux, également, Jean-Pierre Adams, Jules Bocandé, Kaba Diawara, Pierre Dréossi, James Debbah, Fabrice Poulain, Daniel Sanchez, Jocelyn Rico, Liazid Sandjak et Nambatingue Toko. Mais le personnage le plus incontournable demeure Daniel Bravo. Le « Petit Prince », international précoce, a démarré à Nice, entre 1980 et 1983. Après un bref passage par Monaco, il revient au Gym entre 1987 et 1989. L'aventure parisienne l'embarque pour sept ans de passion, puis il retourne une troisième fois à Nice, entre 1998 et 2000.
Bravo a marqué des deux côtés
Désormais consultant pour Infosport et TPS Star (il officiera ce week-end sur Marseille-Nantes), collaborateur de Sportinvest, entreprise de placements financiers pour sportifs lancée par Yannick Noah, Bravo demeure supporter des deux clubs. « J'ai beau ne rien avoir gagné avec Nice, je garde une relation particulière avec ce public. A Paris, j'ai connu sept saisons avec des hauts et des bas, des titres et une intensité remarquable », souligne celui qui est resté très proche de Cobos.
Pour son premier Nice-PSG (2-2), match heurté (quatre carton jaunes sortis par Michel Vautrot, rien qu'en première mi-temps) disputé le 17 octobre 1981, Bravo s'était offert un doublé. « J'avais raté un péno. J'en ai obtenu un second, à cinq minutes de la fin, que j'ai encore tiré. Cette fois, j'ai trompé Baratelli. Courageux de retenter ma chance ? A mon âge, c'était surtout de l'inconscience. Je savais aussi que ce public ne m'en voudrait pas en cas d'échec : il me pardonnait tout. » En octobre 1988 (3-1), Bravo sera de nouveau en verve. Il marque d'un tir puissant après avoir crocheté Dréossi et déséquilibré Bibard. Joël Bats est battu. « C'était l'une des premières défaites du PSG d'Ivic cette saison-là. On avait une belle équipe », évoque-t-il.
En enfilant la tunique parisienne, Bravo ne perdra pas de son efficacité. En août 1990, il répond à Fabrice Mège et égalise face à Nice (1-1), bien servi par Susic. « Revenir au Ray recélait toujours un sentiment bizarre. Ce public m'a tellement porté et soutenu. Jeune, je n'y ai connu que du bonheur. Gagner là-bas pour l'adversaire a toujours été difficile. Même si l'intensité est plus forte contre Monaco ou Bastia, on apprend à Nice à faire de chaque match un derby, afin de se transcender. De toute façon, Paris est toujours attendu, où qu'il aille. »
Le samedi 22 juillet
1989, pour l'ouverture du Championnat, le PSG était sans doute trop attendu. Le
match (3-3) a viré à« Règlements de comptes au stade du Ray » ! Des buts, mais
aussi des contestations, un arbitrage dépassé, de la violence, des cartons
jaunes (6) et des expulsions (le gardien Piveteau, qui poussera avec virulence
l'arbitre après un coup franc de Jeannol; Sandjak dans les arrêts de jeu).
L'autocar parisien sera ensuite attaqué, le pare-brise volant en éclats,
atteignant au visage Bats qui saignera abondamment, Des joueurs se battront même
avec des « supporters » niçois surexcités ! Les Nice-PSG sont virils et pas
toujours corrects. Daniel Bravo, le gentleman ? Il n'était pas sur le terrain.
Il n'aurait pas aimé voir ça !
Les cinq matches phares
Le plus spectaculaire.
Le 17 Février 1978: 2-3
(28e j.). En s'imposant au Ray pour la première fois de son histoire, les
Parisiens remportent la première des trois rencontres qui allaient les opposer
aux Niçois en une semaine !(en Championnat et en seizièmes de finale,
aller-retour, de Coupe de France). Rapidement, le PSG concrétise sa domination
grâce à Brisson (20e) avant qu'Ascery ne marque contre son camp (28e). Les
Niçois reviendront par deux fois (43e et 81e) avant que Redon ne les crucifie en
fin de partie.
Le plus expéditif.
Le 22 Mars 1980: 3-0 (29e
j.). En moins d'une demi-heure, les joueurs de Léon Rossi règlent le sort d'une
équipe parisienne cueillie à froid. Grâce à Bousdira (14e) et un doublé de
Bjekovic (16e et 26e), tous deux excellents ce soir-là, les Niçois, qui luttent
pour le maintien, donnent une véritable leçon de réalisme à un PSG
méconnaissable. Pour le gardien parisien Dominique Baratelli, niçois de 1971 à
1978, ce retour au stade du Ray a donc tourné au calvaire.
Le plus lamentable.
Le 22 Juillet 1989: 3-3 (1fe j.). Malgré six buts inscrits lors de cette première rencontre de la saison, les 15 000 spectateurs présents au Ray ont assisté à un « spectacle » déplorable. Contestations, bagarres générales, arbitrage dépassé, expulsions. « II y a des individualités qui ont pourri la rencontre et qui en ont fait ce qu'elle est devenue », a déclaré le président parisien Francis Borelli à l'issue du match. C'était avant que la situation ne dégénère également en dehors du terrain, entre joueurs parisiens et supporters niçois !
Le plus déséquilibré.
Le 22 Octobre 1994: 0-4 (14e j.). C'est un PSG champion de France qui se déplace au Ray. Dès la 20e, Rai de la tête trompe une première fois Letizi. Après la pause, le capitaine brésilien du PSG inscrit son deuxième but personnel, tandis que Weah (31e) et Nouma (70e) clôturent le festival parisien. En concédant leur septième défaite en treize rencontres, les hommes d'Albert Emon pointent à une inquiétante dix-septième place au classement. Mais ils se maintiendront en fin de saison.
Le plus houleux.
Le 15 Janvier2003 : 0-0
(23e j.). Qui aurait cru, en début de saison, que le promu niçois serait leader
à la veille d'affronter le Paris-SG de Ronaldinho ? Les hommes de Gernot Rohr
n'en finissent plus de surprendre et ce match nul à domicile leur laissera
quelques regrets. M. Poulat dut sortir sept cartons jaunes et expulser Alex
Nyarko (87e)... puis Luis Fernandez (90e).
Cinq joueurs phares
Dominique Baratelli, le chevronné
Avec 593 matches en dix-huit ans de carrière, le Niçois est le joueur le plus expérimenté de l'élite après Ettori et Dropsy. Ses arrêts réflexes de grande classe charmeront l'AC Ajaccio (1967-1971) et l'OGC Nice (1971-1978), où il ne connaîtra que des places d'honneur en Championnat. Cette époque marque également ses débuts internationaux. Il participe au Mundial 78 en Argentine et sera sélectionné à 21 reprises. Son passage au PSG, en 1978, reste sa plus belle période, avec deux Coupes de France (1982 et 1983), elle marque aussi la fin de sa carrière, en 1985, à cause d'une côte fêlée, en Coupe d'Europe, qui le handicapera jusqu'au bout.
Marco Simone, l'éphémère
Arrivé au PSG en provenance du Milan AC, en 1997, l'attaquant au look de star clôt une première saison porteuse d'espoir, raflant Coupe de France et Coupe de la Ligue. Mais, l'année suivante, le club déçoit et l'Italien s'exile sur le Rocher. Ses débuts à l'ASM, en 1999, sont clinquants. L'année suivante, il gagne le Championnat et termine troisième meilleur buteur et meilleur passeur. Après l'euphorie, la disgrâce, accentuée à l'arrivée de Deschamps. II se libère de son contrat en janvier 2004 avant de signer à l'OGC Nice. Mais, trois mois plus tard, il rompt son contrat avec Nice. Il essaie désormais de devenir agent de joueurs.
Nambatingue Toko, l'indomptable
Natif de N'Djamena, Toko débute en France avec les amateurs de Grenoble puis d'Albi. A vingt-trois ans, celui dont le nom signifie l'Indomptable rejoint l'OGC Nice, où il signe son premier contrat pro un an plus tard. Mais Toko est décrié pour sa maladresse devant le but. C'est avec amertume qu'il trimbalera ensuite son baluchon à Bordeaux, Strasbourg, puis Valenciennes, où il s'épanouit. Il boucle la saison avec douze buts et signe au PSG l'année suivante. Il y remportera durant ses cinq saisons deux Coupes de France et gagne enfin une reconnaissance méritée.
Daniel Bravo, l'éternel
C'est à dix-sept ans que le . « Petit Prince» débute à Nice. Daniel Bravo apprend vite, devient l'idole du Ray et rejoint Monaco. Malgré une victoire en Coupe de France, en 1985, l'attaquant international ne s'épanouit pas complètement sur le Rocher. Mais c'est sans compter sur sa force de caractère. Il rebondit à Nice en 1987 et, deux ans plus tard, signe au PSG. Au sein d'une génération exceptionnelle, il étoffe son palmarès (un Championnat et une Coupe des Coupes notamment) et, grâce à Luis Fernandez, se mue en habile milieu défensif. Une fin de carrière en trombe pour ce joueur attachant, qui ne pourra s'empêcher de revenir une troisième fois à Nice.
José Cobos, le patron
A trente-six ans, c'est
le doyen de la Ligue 1. Expérimenté, il totalise 440 matches de L 1, de L 2 et
de Liga espagnole. Cobos débute à Strasbourg et franchit un palier en rejoignant
le PSG en 1993, où il gagne des titres (champion 1994, Coupe de France et Coupe
de la ligue en 1995). II passe ensuite un an et demi à l'Espanyol Barcelone,
avant de rejoindre l'OGC Nice en 1999. II participera largement à la remontée
épique du Gym parmi l'élite, s'imposant comme fer de lance et capitaine d'une
surprenante formation qui frôla la rétrogradation en CFA pour des ennuis
financiers.