La fin de l'âge d'or niçois
Extrait Maxifoot
Cette troisième année de suite en Ligue 1 est la plus difficile pour José Cobos
et les siens. Eliminé des deux coupes, quatorzième en championnat, l'OGC Nice ne
connaît plus la sérénité des saisons précédentes. Le spectre de la relégation a
fait son apparition, exacerbé par les querelles internes. Comment a-t-on pu en
arriver là ?
La saison de trop ?
Cette saison est la plus difficile pour l'OGC Nice depuis son accession en Ligue
1 en 2002/2003. Cette année-là, les hommes de Gernot Rohr avaient surpris la
France entière en restant plusieurs mois dans les premières places du
classement. Et quand, en deuxième partie de saison, une légère baisse de régime
s'était faite sentir, le maintien était déjà acquis depuis longtemps. Au final,
avec 55 points au compteur, les Niçois s'étaient classés 10èmes. En 2003/2004,
les Aiglons avaient maintenu une cadence semblable qui leur avait permis là
encore de ne pas sentir sur leur dos le souffle de la Ligue 2. Finalement 11èmes
avec 50 points, les coéquipiers de José Cobos avaient réussi le plus dur :
confirmer. Formée dans la douleur durant l'été 2002, alors que le club n'avait
vu son accession en première division validée qu'au tout dernier moment,
l'équipe niçoise était devenue en deux saisons une référence en France en
matière de solidarité et de solidité. Les objectifs de ce début de saison
étaient clairs : il s'agissait avant tout d'assurer le maintien. Mais avec deux
saisons en L1 dans les jambes, nul doute Nice rêvait de jouer les trouble-fêtes
dans la première moitié du classement.
«L'année de trop» guette-t-elle les Rouge et Noir ? Au vu des résultats, on peut
le penser. Après 29 journées, Nice est 14ème et ne compte que 5 points d'avance
sur le premier relégable Ajaccio. Les Niçois risquent de souffrir jusqu'à la
dernière journée pour assurer leur maintien. Mais plus que son classement, c'est
la trajectoire de l'OGC Nice qui inquiète ses supporters. Le début de saison
avait été très moyen : après 5 journées, les hommes de Gernot Rohr étaient
avant-derniers du championnat avec à leur actif deux matches nuls et trois
défaites (dont une, cinglante, à Bordeaux : 5-1). S'ensuivent cinq rencontres
sans défaite grâce auxquelles le club s'est hissé à la huitièmes place. Un match
symbolise cette période dorée : la victoire à Monaco où, menés 3-0, Victor Agali
et les siens vont parvenir à inverser la tendance. Le parcours des Rouge et Noir
jusqu'à la trêve suivra le même schéma : à six rencontres sans victoire
succèdent deux succès à Nantes et face à Ajaccio. A Noël, Nice est 11ème.
Depuis, rien ne va plus : l'équipe n'a gagné qu'une fois en 2005 à l'occasion de
la 27ème journée, encore face à Monaco. Quatre défaites et cinq matches nuls
ternissent le bilan du club. L'humiliation subie en Coupe de France à Nîmes, où
les Aiglons se sont inclinés 4-0, illustre cette descente aux enfers.
Un recrutement mis en
cause
Depuis son accession en Ligue 1 en 2002, l'effectif niçois n'avait que peu
évolué. Il se composait de joueurs ayant participé à la montée tels que José
Cobos, le capitaine, les latéraux Noé Pamarot et Cédric Varrault ou l'attaquant
Christophe Meslin. On y trouvait également de nombreux joueurs recrutés à l'été
2002 pour affronter les joutes de l'élite : le gardien de but Damien Grégorini,
Jacques Abardonado, Yoann Bigné et Everson sont dans ce cas. Quelques joueurs
d'expérience tels que Lilian Laslandes ou Olivier Echouafni ont garni les rangs
niçois à l'intersaison 2003 : des retouches, donc, mais pas de profond
bouleversement. La révolution a eu lieu cette année. Pour la première fois,
après le départ d'Everson et de Laslandes notamment, il a fallu recruter. Au
rayon des attaquants, Marama Vahirua est arrivé en provenance de Nantes, Roland
Linz de l'Admira Wacker, en Autriche, Edgaras Jankauskas du FC Porto et Victor
Agali de Schalke 04. Du côté des milieux de terrain, Sébastien Roudet de
Châteauroux, Florent Balmont de l'OL et Roberto Bisconti du Standard de Liège
ont fait leur apparition sous le maillot rouge et noir. Le latéral François
Grenet complète le marché estival de l'OGC Nice.
Après plus de six mois de compétition, force est de constater que la plupart de
ces recrues n'ont pas justifié leur achat. Le Lituanien Jankauskas, champion
d'Europe avec Porto l'an dernier, n'a pas marqué un seul but en championnat. Son
compère Victor Agali n'a brillé que par intermittence. L'agitation née de son
triplé à Monaco, lors du fameux 4-3, est vite retombée : auteur en tout de cinq
buts, le Nigérian est muet depuis la 13ème journée. Si les statistiques de
Marama Vahirua, buteur à 9 reprises, en font l'un des joueurs les plus efficaces
de notre championnat, il ne faudrait pas oublier que le Tahitien a inscrit 6
penalties. Roland Linz n'est quant à lui pas utilisé par Gernot Rohr. François
Grenet est loin d'être un titulaire indiscutable. Finalement, seuls Roudet, par
son activité offensive, et Balmont, véritable poumon de l'équipe, apportent un
réel plus à l'équipe de Nice. On constate également une certaine baisse de
régime dans la défense niçoise : âgé de 36 ans, José Cobos n'a plus ses jambes
de 20 ans. L'arrivée au mercato de Martin Djetou n'a pas stabilisé une défense
qui a encaissé 40 buts cette saison, ce qui en fait la moins performante du
championnat après celle du Stade Malherbe de Caen. Ce secteur est assurément le
talon d'Achille de l'équipe de Gernot Rohr.
Rohr sur la sellette
L'entraîneur Gernot Rohr, grand architecte de la remontée et du maintien en L1
des Aiglons, n'est plus intouchable. Son président Maurice Cohen n'a pas hésité,
suite aux mauvais résultats de l'équipe, à le mettre face à ses responsabilités
: «Mon ambition était de terminer cinquième ou sixième. Pas dix-septième !
déplore le dirigeant. Le coach allemand a même vu son pouvoir sportif réduit.
Les actionnaires du club Rouge et Noir lui ont conseillé de «se recentrer sur
son rôle d'entraîneur. Pas celui de manager.» Pas étonnant, donc, que les
relations entre les deux hommes se soient détériorées. D'un côté comme de
l'autre, on se renvoie la balle, les colonnes du Nice-Matin servant de terrain
de jeu. Une fois de plus, c'est le recrutement qui fait débat : «J'aurais aimé
avoir Maoulida, Feindouno ou Cousin, mais ils les ont jugés trop chers» , lance
Rohr. Cohen assure de son côté que Rohr n'a rien demandé : «Il nous a assuré
n'avoir besoin de personne, hormis Martin Djetou.» Le technicien niçois n'est
pas encore parti. Maurice Cohen n'exclue d'ailleurs pas de le conserver à la
tête de l'effectif des Aiglons la saison prochaine : «Nous souhaitons poursuivre
notre route avec Gernot Rohr. S'il adhère à notre projet.»
Le projet en question, c'est une nouvelle réduction des pouvoirs de
l'entraîneur. La création d'une cellule de recrutement pour la saison prochaine
est déjà en route. Chacun est libre d'y voir le maintien d'une certaine
confiance entre le staff et les dirigeants autant qu'un moyen de pousser
l'actuel entraîneur de l'OGC Nice vers la sortie. Gernot Rohr ne se fait
d'ailleurs pas d'illusions : «S'ils veulent me virer, qu'ils me règlent mes deux
ans de contrat et on se dira au revoir. J'ai déjà vécu ça !» Bref, les deux
parties se tournent le dos. Pendant ce temps-là, le club continue de
s'enfoncer... Et avant de penser à la saison prochaine, il y a le maintien à
décrocher. Les joueurs, spectateurs impuissants de cette guerre des mots entre
leur encadrement, ne peuvent plus compter que sur eux-mêmes s'ils veulent
retrouver leurs capacités. «Maintenant, il va falloir nous remettre en question»
lance Balmont, l'un des leaders de l'équipe. Le capitaine José Cobos compte lui
aussi sur le vestiaire niçois pour réussir l'opération sauvetage. Selon lui,
«l'ambiance est toujours excellente. Nous donnons toujours le maximum.» L'ancien
Parisien fait même preuve d'un certain optimisme, puisqu'il affirme que son
équipe «peut toujours terminer 8ème ou 9ème, soit mieux que le saisons
précédentes.» Le temps des paroles est fini, place aux actes.
On pourra toujours critiquer le recrutement de cet été, rejeter la faute sur
l'un ou l'autre des dirigeants du club, cela ne changera rien : la priorité
actuelle du côté de l'OGC Nice est de maintenir le club en Ligue 1.
L'environnement du club, qui traverse sa crise la plus profonde depuis son
retour parmi l'élite, risque tout de même de porter préjudice aux performances
de l'équipe.