Ederson:

"Ma fiancée, c'est le foot!"

 

Extrait

 

 

Décidément, Monaco te réussit !

C'est vrai... Je suis très heureux d'avoir été décisif deux fois contre Monaco. Ce sont toujours des matchs particuliers. Vous les appelez derbys, c'est ça ?

C'est comme ça qu'on dit, oui...

Voilà... Ce sont des matchs qu'on apprécie toujours de jouer. Le public est chaud, il y a de l'ambiance et de grands joueurs dans l'équipe adverse. Alors quand on réussit une bonne performance dans ce contexte, on est heureux car ça récompense le travail à l'entraînement et on gagne en confiance. C'est très important. Quand le mental est bon, on progresse vite.

Raconte-nous ce but contre Monaco, comment l'as-tu vécu avant, pendant et après ?

Au départ de l'action, je vois Cyril (Rool) qui donne la balle à Seb (Roudet), et comme Seb est un excellent dribbleur, je sais d'avance qu'il va vouloir déborder. A ce moment-là, je me dis qu'il faut que je me place bien dans la surface pour reprendre son centre. C'est ce que je fais. Pendant qu'il déborde Maicon, je me positionne pour couper la trajectoire et quand je vois le ballon arriver, je me jette tête en avant sans calculer. Après, je vois les filets bouger, je sais que c'est la fin du match, que l'exploit est là, je suis heureux. Les moments qui suivent sont exceptionnels dans la joie, avec nos supporters qui chantent et fêtent la victoire.

Ederson « le technicien » qui marque de la tête, ce n'est pas si courant...

Chaque joueur a ses caractéristiques, et c'est vrai qu'habituellement je suis plus un joueur qui essaie de jouer à terre, de provoquer balle au pied. Mais en football, parfois il faut savoir forcer sa nature pour s'imposer. Sur le but de Monaco, c'est un peu ce que j'ai fait. Et puis, c'est aussi grâce au travail que l'on peut réussir des choses que l'on n'a pas l'habitude de faire. Chaque jeudi par exemple, nous travaillons ce type de ballons aériens dans la
surface. Chaque fois, j'essaie d'être concentré au maximum pour progresser. J'essaie d'améliorer mes gestes, mes points faibles. Et quand ça paie, ça donne encore plus envie de continuer à bosser.

Le Stade de France, ça te parle ?

C'est un peu votre Maracana, je crois non ? J'ai eu la chance de jouer à Maracana quand j'étais encore au Brésil, c'est formidable. Ces grands stades sont impressionnants par leur affluence, mais aussi par leurs passés prestigieux. Fouler la même pelouse que des légendes du foot, c'est un grand honneur. Bon, je sais que le
Stade de France n'a pas réussi au Brésil en 98, mais j'ai quand même hâte d'y être. En plus nos supporters vont faire le déplacement, ça va être chaud !

Tes proches ont-ils suivi ce Monaco-Nice depuis le Brésil ?

Bien sûr ! J'avais appelé ma famille avant le match, j'ai dit à ma mère qu'il fallait qu'elle prie pour moi car c'était le match le plus important de ma vie. Elle m'a dit « Ne te fais pas de soucis, sois tranquille, ce sera fait ». Vous imaginez notre joie quand j'ai rappelé après le match.

D'un point de vue plus général, quel regard portes-tu sur ton expérience niçoise ?

Je suis venu ici pour grandir. Je savais qu'il fallait que je vienne en Europe pour continuer à progresser dans un football plus dynamique et physique. Là, je peux vous dire que j'apprends beaucoup. Tout n'a pas été rose pour moi depuis mon arrivée, j'ai connu des moments plus difficiles. En début de saison, je ne jouais pas trop, j'étais souvent avec la CFA. Franchement, c'était dur à vivre... Mais je n'ai pas lâché. Je me suis réfugié dans le travail, j'ai marqué des buts en CFA, j'ai appris à être patient. C'est toujours dans la difficulté que l'on progresse le plus.

Venir à Nice était donc le bon choix...

Et ça le reste ! Je l'ai compris tout de suite en arrivant. Au bout d'une semaine, j'étais intégré, je me sentais bien. Je quittais mon pays, pour la première fois j'étais très loin de ma famille, j'avais besoin de ce contexte pour réussir mon adaptation en Europe malgré mon jeune âge. L'accueil qui m'a été réservé à Nice a été exceptionnel. J'ai été adopté très vite, ça m'a beaucoup aidé.

En tout cas, on sent que tu es bien dans tes baskets. Le fait d'avoir très rapidement appris le français a dû te faciliter la tâche, non ?

C'était primordial. Dès que je suis arrivé, j'ai demandé à prendre des cours de français car je savais que c'était indispensable pour mon adaptation. J'ai eu 39 heures de cours qui m'ont permis de connaître les bases de votre langue, maintenant je me débrouille même s'il me reste pas mal de choses à apprendre, notamment au niveau de l'écrit car l'essentiel de ce que j'ai appris est oral.

Par ailleurs, sur la Côte on peut dire que niveau climat tu n'es pas trop mal tombé...

(rire) J'ai eu beaucoup de chance. Je m'en suis rendu compte quand on a commencé à jouer dans le Nord en hiver. Si j'avais été à Lille, j'aurais eu un choc ! En fait, le climat d'ici ressemble un peu à celui de Porto Alegre, la dernière ville où j'ai habité au Brésil. Moi, ça me convient même si ce n'est que secondaire. Je ne suis pas venu à Nice pour le climat !

Plus sérieusement, ta progression depuis ton arrivée est-elle à la hauteur de tes attentes ?

Je dirai oui, même si j'espérais jouer plus en arrivant. C'était d'ailleurs le cas au début, mais ensuite je me suis blessé et quand je suis revenu l'équipe ne tournait pas bien et se battait pour le maintien. Après, je ne vous cache pas qu'en début de saison je pensais avoir plus souvent l'occasion de m'exprimer. Mais le club a vraiment bien recruté et la concurrence est encore plus féroce qu'avant. Pas facile de se trouver une place... Je le comprends très bien. Si ce n'était pas le cas, je ne serais pas là d'ailleurs. C'est toujours difficile à accepter, mais il n'y a que comme ça que l'on progresse.

Après, il faut dire aussi que peu de jeunes de 19 ans sont en ce moment titulaires en L1...

Comme ce championnat est très exigeant, c'est plus difficile pour un jeune de s'imposer. Mais c'est à nous de nous battre, d'être ambitieux et de vouloir grandir. Le championnat est dur, il y a toujours un moment où l'on peut avoir sa chance. C'est pour cela qu'il faut toujours travailler et se tenir prêt pour ne pas la laisser passer. C'est ce que je fais.

Qu'est-ce qui t'a le plus marqué en L1 ?

Les contacts ! On peut dire que chez vous ça y va sur le terrain. J'ai jamais pris autant de coups ! Même à l'entraînement, ça taille des fois ! C'est vraiment un truc auquel il a fallu que je m'habitue.

Au Brésil, ce championnat bénéficie-t-il d'une bonne image ?

Oui car de bons joueurs brésiliens ont joué en France comme Rai ou Ronaldinho. Les Brésiliens savent qu'ici c'est très difficile, surtout dans un club comme Nice au sein duquel on est plus rapidement amené à avoir des responsabilités. On ne peut pas se cacher, mais c'est une bonne pression qui permet se forcer un caractère.

Et l'OGC Nice ?

On ne peut pas dire qu'au Brésil Nice soit très réputé, mais j'espère pouvoir faire de la publicité au club le plus vite possible (rire). Je lui dois bien ça, surtout à Roger Ricort qui s'est battu pour me faire venir. J'espère que je saurai combler ses attentes.

En ce qui te concerne, tu es arrivé en France à tout juste 18 ans, n'était-ce pas un peu jeune ?

C'était un choix difficile. Beaucoup de joueurs brésiliens débutent quelques années chez les pros avant de penser à s'exiler. Mais moi, je ne jurai que par l'Europe. C'est ce qui m'attirait le plus, je savais qu'il fallait passer ce cap pour aller plus haut. Et loin de chez moi, j'ai autant appris sur le terrain qu'en dehors.

Loin de chez toi, tu as aussi dû apprendre à vivre seul...

Ça a été un immense changement dans ma vie, mais je m'y suis fait... Je reste en contact quasi permanent avec ma famille via Internet, c'est très important car pour moi la famille c'est la base de tout dans la vie. Et puis je me suis fait des amis ici et mon agent est souvent là.

Tu disais avoir été très bien accueilli au club, quels sont les joueurs dont tu es le plus proche dans l'équipe ?

Je ne peux pas dire un joueur plutôt qu'un autre, chacun m'a un peu aidé. Quand je suis arrivé, José m'a dit des choses très importantes. C'était un super capitaine. Chouf, Flo Jarjat et Pancho aussi m'ont envoyé des signes forts. Mais tout le monde a compté pour moi à un moment ou l'autre.

A Nice, tu as connu Gernot Rohr, Gérard Buscher et désormais Frédéric Antonetti au poste d'entraîneur. Comment cela se passe avec lui ?

C'est un coach qui parle beaucoup avec ses joueurs et qui sait leur transmettre sa passion. Il vit le football à fond, ça se sent dès qu'on le rencontre. Avec lui, quand on entre sur le terrain, on sait tout de la mission qu'il attend de nous, les choses sont claires.

Dernièrement, il t'a utilisé à un poste un peu plus défensif qu'à l'accoutumée, finalement on ne sait plus vraiment quel est ton poste de prédilection...

J'ai parfois évolué en deuxième attaquant par le passé, mais là où je pense donner le meilleur de moi-même c'est en meneur de jeu derrière deux attaquants. c'est le poste auquel j'ai été formé. C'est vrai que le coach m'a placé quelques fois à des postes plus défensifs au milieu, je donne tout ce que j'ai mais je dois reconnaître que c'est difficile pour moi. Je ne suis pas très performant dans le jeu défensif, c'est un point que j'essaie d'améliorer, mais ce n'est pas dans ma nature. Moi, j'ai toujours attaqué, là il faut que je m'adapte. Mais comme je l'ai dit, c'est pour ça que je suis venu en Europe. Je savais qu'il faudrait apprendre de nouvelles choses et ça ne peut que me rendre meilleur.

Quels sont tes objectifs pour la suite des événements ?

Mes objectifs sont les mêmes que ceux de l'équipe car je pense avant tout au collectif. Car rien ne se fait en foot en dehors du collectif. Pour la fin de saison, j'espère que nous saurons
porter l'équipe le plus haut possible en championnat. Concernant la coupe, inutile de préciser que nous avons en tête de la gagner. Pour y parvenir, il faudra que chacun d'entre nous soit encore plus ambitieux au niveau personnel. La somme de tout ça devrait donner quelque chose de
pas mal si on arrive à rester à fond.

On sent que tu ne veux pas trop parler de toi et surtout de tes objectifs à moyen terme...

Vous savez, j'ai un agent pour penser à ma carrière et me permettre de ne penser qu'au foot. Ensemble, nous fonctionnons par le dialogue. Nous parlons beaucoup, nous pesons le pour et le contre de chaque décision, mais c'est lui qui se focalise sur les histoires de contrats et tout ça. Moi je me concentre sur le terrain.

Quelles sont les qualités nécessaires d'un agent selon toi ?

La première chose c'est l'honnêteté. Ensuite, il faut qu'il soit respecté et respectueux. Enfin, il faut aussi qu'il y ait une complicité entre le joueur et son agent. J'ai la chance de pouvoir travailler avec une personne qui réunit tous ces critères.

On imagine qu'il t'a concocté un joli plan de carrière, la Coupe du Monde 2010 en fait-elle partie ?

La coupe du Monde, c'est vraiment un rêve. Quand on est Brésilien, faire partie de la sélection a encore plus de signification qu'ailleurs tant il y a de nombreux joueurs de talent. La sélection est féroce, il faut vraiment être au top pour rentrer dans l'équipe. Ça va être dur, mais je vais tout donner pour atteindre cet objectif. C'est un travail de chaque jour pour y arriver.

Et si l'on évoquait l'homme Ederson, que dirais-tu sur lui?

C'est quelqu'un de simple. Un jeune Brésilien comme il y a en a beaucoup, passionné par le cinéma et la musique brésilienne qu'il écoute à longueur de journée, surtout lors des déplacements. C'est quelqu'un qui sait la chance qu'il a de faire ce métier et qui essaie de mettre toutes les chances de son côté pour réussir. Entre les matchs et les entraînements, j'essaie toujours de bien récupérer physiquement. Il faut savoir se gérer. Ça va peut-être en étonner quelques-uns, mais je n'aime pas trop sortir, je ne suis pas un homme de la nuit comme certains de mes compatriotes (rire). Je sors peu, comme je vis seul, je suis très souvent sur Internet avec ma famille et mes amis.

Pas de Mme Ederson ?

J'ai une copine au Brésil, mais cela ne va pas plus loin pour l'instant. Ma fiancée c'est le foot !

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