Olivier Echouafni :
"J'ai hâte que le club franchisse des paliers, mais il faut le faire lentement"
Extrait
Lorsqu'à 20 ans, tu évoluais sur les terrains du stade Charles-Erhmann avec l'équipe de la faculté de sport, le foot pro n'était-il pas devenu un vieux rêve ?
C'est marrant que l'on
parle de ça parce que jeudi, je suis passé voir un bout du 1/4 de finale qu'ils
disputaient contre la fac de Marseille en championnat de France. Pour en revenir
à la question, c'est vrai qu'à la base, comme beaucoup de jeunes, faire une
carrière pro était un rêve caché. À cette époque, je continuais mes études et
j'essayais surtout de prendre un maximum de plaisir avec mon club amateur et
avec la fac, qui me permettait de partir à travers la France pour participer aux
matches du championnat universitaire. Et honnêtement, je ne me posais pas cette
question, je me concentrais sur mes études. Quand à 18-20 ans, tu n'as pas fait
de centre de formation, tu ne te demandes plus comment tu pourrais arriver pro.
J'ai donc poursuivi mon bonhomme de chemin...
Toi qui es issu du
monde "amateur" , penses-tu revenir à tes premières amours en fin de carrière,
du côté de Roquebrune par exemple ?
C'est un peu trop tôt
pour en parler. Actuellement, je vis au jour le jour, je suis sous contrat avec
Nice et je ne pense pas encore à mon « après-foot » sur les terrains amateurs.
Par contre, pourquoi pas, j'y ai encore beaucoup d'amis que je vais voir dès que
j'en ai l'occasion. Et puis, on a toujours énormément de plaisir à revenir à ses
premières amours...
Justement, en parlant
de Roquebrune, il y a quinze jours tu as été témoin par téléphone (il était en
ligne avec son ami et gardien Olivier Taboué) de l'embuscade faite par les
joueurs de Rognac (DHR) à ceux de ton ancien club après le match. Cela a dû te
remémorer certains souvenirs de ton passage en PHA ?
Pour en revenir à cette
histoire, je n'ai pas compris sur le moment. J'étais au téléphone avec mon ami,
Olivier Taboué, et j'ai brusquement entendu du bruit. C'est seulement après coup
qu'il m'a raconté les détails de ce qui s'était passé. Mais paradoxalement, je
n'ai jamais connu de tels actes de violence lorsque je jouais à Roquebrune.
J'essaye de me tenir au courant de ce qui se passe, par des amis qui
jouent à ces niveaux, et il semble que ces phénomènes se multiplient dans le
milieu amateur. Nous, au niveau professionnel, on a valeur d'exemple, mais il ne
peut
pas y avoir de telles dérives parce que les sanctions sont exemplaires. Je pense
qu'une des solutions passe par la répression, avec des sanctions longue durée.
Le problème actuellement est que ces phénomènes de violence sont en train de
dégoûter de plus en plus de joueurs qui préfèrent tout simplement arrêter, alors
que l'essence même du football réside dans la passion et le jeu.
Peu de gens savent
que c'est de Roquebrune que tu es parti à l'Olympique de Marseille en 1994.
Comment s'est déroulé ce transfert peu banal ?
En fait, je suis arrivé à
Marseille en 1993, mais je n'ai pas pu jouer cette année-là en pro parce qu'il y
avait déjà trop de contrats stagiaires. Le mien n'a donc pas été validé. Je n'en
avais jamais parlé jusqu'à maintenant, mais on s'est retrouvé à deux dans le
même cas, à devoir signer pour un poste au sein du club qui présentait les mêmes
avantages qu'un contrat de stagiaire, mais qui ne nous permettait pas de jouer
avec l'équipe première. Voilà pour l'anecdote, sinon concernant mon départ à
Marseille, cela tient du concours de circonstances. À l'époque, Bernard Petiot,
un coéquipier à Roquebrune, me disait qu'avec mes qualités, je devrais essayer
de viser plus haut. Un jour, il m'a demandé si je voulais qu'il en parle à son
beau-frère, Jean Castaneda, qui travaillait alors au centre de formation de
l'OM. Tout s'est bien goupillé et je suis parti faire une semaine d'essai en
mars 1993. Je me suis entraîné avec le centre et j'ai fait un match amical
contre la D2 d'Istres, où il y avait notamment Libbra et Boghossian. Les
dirigeants m'ont demandé de revenir un mois et demi après pour participer au
grand tournoi international de Sainte-Marguerite. Là encore, tout s'est bien
passé et je suis arrivé en mai dans le club qui venait de remporter la Ligue des
Champions. Moi qui baignais dans le foot amateur, je me retrouvais dans le
vestiaire à côté des stars olympiennes et nous avions même fait deux oppositions
contre eux à quelques semaines de la finale à Munich. À cette période, je vivais
plus qu'un rêve !
Ton parcours atypique
pour atteindre le haut niveau ne te fait-il pas percevoir le professionnalisme
d'une façon différente de tous les joueurs qui ont suivi la filière classique ?
Automatiquement... Je
suis content de n'avoir intégré un centre de formation qu'à 19 ans. Cela m'a
permis de continuer mes études, mais aussi de connaître « la vie de tous les
jours ». Je sais combien il est difficile de vivre aujourd'hui avec des salaires
bas. J'ai fait des petits boulots pour gagner un peu d'argent. Comme les autres
jeunes, j'ai ouvert les yeux sur ce qu'était réellement la vie. Dans un centre,
on n'est pas confronté à cela, tout est servi sur un plateau. Alors, il se pose
obligatoirement le problème de ceux qui ne percent pas et qui ont arrêté leurs
études. À cet âge, les parents ont un rôle important à jouer et pour rien au
monde un jeune ne doit négliger sa formation scolaire.
Penses-tu que le fait
d'avoir eu cette trajectoire en découvrant le professionnalisme à 23 ans puisse
avoir une incidence sur ta fin de carrière ?(fraicheur, physique et
mentale)
Il y a quelques années,
j'aurais dit sûrement, mais avec le temps je me suis rendu compte que ce n'était
pas aussi simple que ça. Il y a toujours plus de matches, l'hiver on joue sur
des terrains difficiles, etc. Je pense donc qu'à un moment donné, mon corps me
dira stop. Mais il est difficile de savoir quelle influence aurait eue sur ma
fin de carrière le fait de suivre la filière classique des centres de formation.
On parle souvent des
" anciens "comme Cobos,Valencony et Roy pour prendre des responsabilités au club
une fois les crampons raccrochés. Sans vouloir te pousser vers la retraite
prématurément puisque tu n'as que 31 ans, as-tu déjà réfléchi à cette éventualité
?
Il est encore trop tôt
pour en parler, mais pourquoi pas. Cela ne fait que 6-7 mois que je suis au club
et j'apprécie le fait que les gens aient l'impression que je fasse partie des
meubles. J'ai une mentalité club et j'essaye de tout donner pour apporter ma
pierre à l'édifice. Avant de penser à cela, je souhaite déjà continuer à prendre
sur le terrain le plaisir que j'avais perdu à Rennes. Après une reconversion à
l'OGC Nice, pourquoi pas si on m'en donne l'opportunité... Il y a déjà beaucoup
d'anciens qui travaillent au club et je pense que c'est la bonne formule. La
réussite passera par là. Regardez ce qui se fait à Nantes...
Tu te situes entre
l'ancienne génération (les Cobos, Roy, Valencony, Simone) et la nouvelle vague
(les Varrault, Pamarot, Cherrad, ...). Comment te positionnes-tu ausein du
groupe et quel rôle essayes-tu d'y jouer ?
Même si je ne suis pas le
plus ancien, j'essaie d'apporter mon expérience. Il y a des jeunes qui ont du
talent, qui ont envie de progresser et de franchir des paliers. Une de mes
missions est de les aider à y parvenir dans la mesure de mes possibilités.
Après concernant les
anciens, ils montrent l'exemple et la marche à suivre. Personnellement, je
m'imprègne de ce mental et j'espère pouvoir le transmettre aux plus jeunes.
Revenons au terrain, même si tu as toujours répondu présent depuis ton arrivée,
depuis quelques semaines tu sembles avoir pris une nouvelle dimension. Comment
l'expliques-tu ?
J'ai surtout l'impression
d'avoir retrouvé une certaine confiance. En jouant plus fréquemment, j'ai
retrouvé mes qualités, que je ne pense d'ailleurs jamais avoir perdues. Après,
si je peux apporter un plus à l'équipe, c'est bien.
Le match de Strasbourg t'a permis d'inscrire ton premier but de la tête. Mais où
était passée ta célèbre arme fatale ?
C'est marrant parce que
j'ai cru lire quelques articles, notamment chez vous (rires), où il était dit
que l'on attendait avec impatience mon premier but de la tête. Paradoxalement,
je l'ai marqué sur un terrain où j'en ai marqué plein avec Strasbourg... et dans
le but où j'en ai mis le plus. Mais vous savez, ce n'est pas facile de se
démarquer, demandez à Cédric Varrault. Avec Lilian, on lui dit souvent qu'il
nous gêne énormément dans la surface. Et comme par hasard, je marque le match où
il n'est pas là. (rires) Mon prochain objectif est de marquer au Ray avant la
fin de la saison, parce que mes trois buts, je les ai mis en déplacement.
Après Strasbourg,
c'est une nouvelle fois un de tes anciens clubs qui se présente sur votre route
avec Rennes. Quels souvenirs en gardes-tu ?
Un bon et un mauvais... Le bon, c'est que j'ai rejoint Rennes après une énorme saison avec Strasbourg. Je suis donc arrivé avec beaucoup d'ambition dans un club qui s'était donné les moyens de réussir avec le 8e budget européen, juste derrière le Milan AC. Le mauvais concerne la façon dont cela s'est terminé. Il ne faut pas se cacher la vérité, je n'ai pas du tout apprécié la façon dont les dirigeants m'ont demandé de partir. Je m'étais beaucoup investi dans les périodes de crise (on a quand même eu 5 coaches en 3 ans) et je souhaitais repartir avec le club sur de nouvelles bases, mais cela ne s'est pas fait. Mais avec le temps, j'ai l'impression que cette décision m'a été plus bénéfique qu'à eux.
Avec les dizaines de millions d'euros dépensés par François Pinault depuis son arrivée à la tête du club, le Stade Rennais ne peut-il pas être considéré comme le plus gros gâchis du football français de ces 10 dernières années ?
Je ne sais pas, mais
c'est vrai qu'il y a eu beaucoup, beaucoup d'argent investi pour rien, alors que
le club avait un très bon centre de formation. Le problème de fond est que les
dirigeants ne s'appuient pas sur une politique cohérente. Une intersaison, ils
ne recrutent que des joueurs à l'extérieur et l'année d'après ils changent
totalement d'optique en faisant signer huit nouveaux contrats professionnels. :
Pour le moment, ils n'ont pas su trouver le juste milieu.
En parallèle, avec
une gestion saine et l'arrivée d'un grand stade, l'OGC Nice ne peut il pas être
la révélation des 10 prochaines...
Je le souhaite.
Personnellement, j'aimerais bien connaître le nouveau stade. J'ai hâte que le
club franchisse des paliers, mais il faut le faire lentement. Au niveau sportif
notamment, il faut faire attention, l'attente des supporters est plus grande
chaque année, mais ils ne doivent pas vouloir les choses trop vite. L'arrivée du
futur Grand Stade ne signifie pas une équipe de stars et une qualification pour
la Ligue des Champions. Le stade n'est pas une finalité en soi. Les dirigeants
en sont conscients et tentent de garder leur ligne directrice. Il faut,
également faire évoluer les équipements parce qu'un grand club se doit d'avoir
des outils adéquats. À ce niveau, l'implication de la Mairie est aussi
rassurante. Nice mérite une belle équipe et un beau stade !
À l'image de nombreux
joueurs qui reculent au fil des ans, tu présentes le profil pour diriger une
défense. Comme José Cobos, te verrais-tu finir libéro ?
Si José prolonge, ce sera
difficile. Je plaisante, je lui souhaite de continuer le plus longtemps
possible, comme Bruno et Éric d'ailleurs. Ils sont l'âme de ce groupe. Pour
revenir à la question, le poste de libéro je le connais pour y avoir joué en
équipe de jeunes. Mais le foot évolue et ses exigences aussi. J'apprécie ce
poste, mais celui de milieu de terrain aussi, même si les efforts ne sont pas du
tout les mêmes. Pour le moment, je suis très bien à ma place.
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