Gerard Buscher:

 

" Je n'aime pas les longs discours..."

 

Extrait

 

 

Après quelques heures d'entraînement: est il possible de nous dresser un premier bilan?

Je suis avant tout très content de la réaction du groupe. Tout s'est déroulé assez vite et rien en laissait transparaître que ça aller bien se passer... Au final les choses ont été dites clairement et tous ont accepté de se remettre en cause sans sourciller. Pour l'instant je n'ai pas vu de tricheurs et c'est la  première chose qui me donne le sourire. De toute façon, pour s'en sortir, il n'y a pas de secret. Cela se fera sur un plan mental uniquement. Pour autant, il n'y aura pas de révolution. Nous demandons à tout le monde de se remettre au travail en insistant sur le physique... et tous répondent présent. Tout s'enclenche parfaitement et les premières impressions ne peuvent donc n'être que positives...

Quels ont été vos premiers mots au groupe rouge et noir ?

Nous avons évité de beaucoup parler... Tout le monde fait déjà énormément de commentaires pour éviter d'en rajouter. Moi, je ne veux pas sortir du contexte football. Depuis pas mal de temps, on oubliait que la vérité sortait uniquement du terrain. Je leur ai simplement dit :« Les gars, ce que vous avez fait depuis deux ou trois ans est et restera fabuleux. Je peux comprendre qu'il y ait un respect avec ce qui s'est passé, mais je veux qu'il y en ait aussi pour ce que nous pouvons faire... » C'est tout. Vu notre position au classement qui parle d'elle-même, il n'y a plus rien à calculer. Il faut prendre des points et marquer de façon indélébile qu'il ne reste que quatre finales pour sauver l'essentiel. Pour ça, il faut être pro et éviter d'avoir des regrets au soir de la dernière journée. Le reste après... découlera de ce qui se passe sur le terrain.

Est-ce que certains s'attendaient à des décisions plus radicales de votre part ?

Non, je ne crois pas. Par contre, je suis certain que tout le monde a accepté le fait de se remettre en cause. Pourquoi voulez-vous que je chamboule tout ? D'un autre côté, ce groupe-là avait-il besoin d'une révolution ? À ces questions, je vous répondrai que non. J'ai un grand respect pour ce groupe et il n'y a pas de volonté au départ de le " casser ". Si un joueur sort de l'état d'esprit, je l'éliminerai sans état d'âme. Mais aujourd'hui, je n'ai aucune raison de tirer des enseignements et de mettre des étiquettes sans avoir laissé une chance à quelqu'un. La seule différence est que les joueurs écartés peuvent à nouveau se battre pour une place sur le terrain. C'est tout et l'unique motivation. Il n'y a personne d'indispensable, mais tous le sont...

Qui ne fait pas partie des 22 ?

Tous les professionnels du club font partie des joueurs susceptibles de défendre les couleurs rouge et noire. Aujourd'hui, je n'ai renvoyé en CFA que deux joueurs, Denis Bolshakov et Franck Padovani. Tous les autres font partie des plans du coach et ça s'arrête là !
Physiquement, vous avez dit qu' " il y avait une réelle envie de travailler"... Qu'est-ce qui peut s'améliorer en si peu de temps ?

Il ne faut pas être résigné par rapport au peu de temps qu'il nous reste pour travailler. En  dix jours, si nous ne pouvons changer le profil d'une équipe, nous pouvons au moins lui donner le goût du travail. Psychologiquement, c'est essentiel. En gagnant, simplement 10 à 15% de potentiel en plus, vous multipliez automatiquement votre mental et votre aptitude à lutter par deux. Nous devons être à 200% pour nous en sortir. Se sentir bien dans sa tête et dans ses jambes ne peut qu'y contribuer. Lorsqu'un joueur cravache à l'entraînement, il se sent automatiquement costaud. La confiance est là et il se déclenche un processus positif. Après, il faut de la réussite, mais ça malheureusement je ne le maîtrise pas.

Les statistiques montrent qu'un changement l'entraîneur est souvent bénéfique...

Je vous rappelle que les statistiques sont faites Aussi pour êtres démenties. La seule statistique qui Compte découle des derniers matches. Nice, sur la phase retour, est dernière. Si l'équipe continue sur le même rythme, elle descend. Ma mission est d'essayer de sortir l'équipe de cette spirale. Ce sont les seuls chiffres qui m'intéressent.

Parallèlement, sur quel aspect tactique allez-vous mettre l'accent ?

Je sais juste une chose, c'est que nous ne jouerons pas à cinq derrière.

La CFA est un championnat moins médiatique. Tactiquement, quel schéma affectionnez-vous le plus ?

Je n'ai pas de tactique particulière. Rien n'est d'ailleurs jamais défini en foot. En quatre années de CFA, je n'ai que rarement aligné la même équipe. Je pense qu'il ne sert à rien d'avoir des idées arrêtées. Les joueurs ont une importance capitale dans les choix tactiques. Nous pouvons autant jouer à trois derrière qu'à un, deux ou trois attaquants. Nous verrons aussi en fonction de l'adversaire. L'approche tactique est avant tout un assemblage de différents paramètres que celle d'un projet de base figé.

Dans le système actuel, il semble difficile de se passer de poids sur le front de l'attaque...

Oui et non... Nous devrions aborder les rencontres avec deux attaquants minimum. C'est la première certitude. Je veux gagner avec des attaquants. Pour sortir avec les trois points de toute façon, il faut marquer. La démarche est simple, la concurrence saine. Je veux juste recentrer les joueurs à leur poste de prédilection. Les remettre à leur poste...

Est-ce une façon de préciser qu'un garçon comme Vahirua sera aligné sur le front de l'attaque et non plus à droite ?

S'il joue, c'est devant (rire) ! Un point, c'est tout. Idem pour Djetou. Martin est un axial, pas un latéral. Il a un passé, une expérience énorme dans l'axe.
Pourquoi s'en priver à ce poste ? Ma volonté première est de recentrer les joueurs vers leur poste de prédilection.

Pour Pancho, c'est donc défense centrale...

Oui.

Vous semblez beaucoup lui parler...

Non, je m'implique avec lui comme avec les autres. Après, c'est vrai que j'aime bien partager des trucs sur le terrain. Des petits mots, de la complicité, des remarques et des échanges... Je n'aime pas les rendez-vous solennels dans les bureaux. Je veux que les joueurs adhèrent à une volonté commune de travail et tout doit se régler sur le terrain dans le feu de l'action. Alors dans ce sens, oui.

Un VictorAgali peut-il être relancé ?

Oui. C'est à lui et à un garçon comme Jankauskas de me montrer que l'on peut compter sur eux. Ils ont un passé. Pourquoi voulez-vous que l'on s'en passe, sans leur laisser la chance de montrer qu'ils ont envie de se mettre le ventre à terre pour les autres. Tout est question de motivation...

Inversement Comment arriver à produire du jeu sans point de fixation devant ?

Il y a des solutions. Un dix et deux vifs, deux grands ensemble avec deux vifs sur les côtés...s'ils sont en confiance, les solutions ' existent devant. Un duo Meslin-Vahirua peut largement s'en sortir sans tourner autour d'un point de fixation. De toute façon, aujourd'hui personne n'est condamné et tout le monde aura sa chance.

Les statistiques sont assez impitoyables : quasiment quatre cinquièmes des points pris par l'OGCN l'ont été avec deux hommes dans les couloirs..

Ce sont des statistiques...

La volonté de produire du jeu condamne-t-elle un troisième récupérateur ?

Non. Il n'est pas obligatoire de condamner un troisième récupérateur pour faire du jeu, surtout si vous avez des Dié, Bisconti, Echouafni ou Balmont qui restent habiles de leurs pieds. Depuis tout à l'heure, nous parlons de schémas de jeu et de différentes configurations. Simplement, il ne faut pas oublier l'essentiel. Vous pouvez mettre en place n'importe quelle tactique, elle ne fonctionnera qu'avec un minimum d'envie et d'animation. C'est un tout, un état d'esprit qui marche ou pas sur le terrain...

Pour l'instant, il n'y a pas de révolution « Buscher » avec un apport massif de jeunes. Est-ce de la psychologie ou une manière de réconforter les cadres de l'équipe ?

Je ne suis pas fou ! Le groupe pro est assez compétitif sur ce qu'il me montre. IL ne faut pas griller les jeunes. La pire des entrées en matière serait de les lancer maintenant et de les envoyer au charbon. C'est tout sauf un acte de confiance. Je crois qu'il serait assez suicidaire de lancer un gamin à Ajaccio par exemple et lui demander de sauver la saison...

À terme, quels sont les joueurs de CFA qui pourrait avoir une chance ?

Aucun. Aujourd'hui, on ne parle plus de qualité, mais d'expérience. Pour se maintenir, il faut se présenter sur le terrain en costaud, dans la tête et dans les jambes. Nous avons besoin de « solidité » mentale et psychologique...

La loyauté d'un garçon comme Scotto en CFA (NDLR : il n'avait pas hésité à venir renforcer l'équipe dans un match important à Montpellier alors qu'il était en stage à St-Martin sera-t-elle récompensée ?

Il a une chance effectivement. Il m'a montré qu'il était en pleine possession de ses moyens. Après, il postule comme les autres. Je le répète, tous les joueurs auront leur
chance. J'insiste...

Est-ce que la victoire de la CFA à Bourg Péronnas (NDLR: maintien assuré) a pesé dans la décision des dirigeants de vous faire confiance ?

Je n'en sais rien... J'espère que non, d'ailleurs ! C'est certain qu'elle est bienvenue cette victoire. Elle assure quasiment le maintien et elle a démontré qu'à terme, il y a du talent chez les jeunes du centre. Pour en revenir à cette question, je souhaite simplement que les dirigeants se basent sur d'autres éléments que la victoire de ce week-end (rire) !

Qu'avez-vous dit aux jeunes de la CFA au moment de leur annoncer la succession de Gernot Rohr?

J'ai dû leur dire trois mots comme pour les pros ! Vous savez, je n'aime pas les longs discours. Je me souviens que joueur, au-delà de cinq minutes, je finissais toujours par somnoler. Je leur ai juste dit que j'étais fier de leur comportement et de la façon dont ils ont réussi à redresser la tête dans ce championnat. Je les ai félicités du gros truc qu'ils venaient de réaliser à Bourg-Péronnas... et puis, je leur ai souhaité bonne chance avec leur nouvel entraîneur qui les a tout de même conduits au titre de champion de France l'an dernier. Pour conclure, je n'ai pas oublié de leur glisser qu'à la fin de la mission confiée au-dessus, ils pouvaient très bien me récupérer l'an prochain et qu'il ne fallait pas qu'ils se réjouissent trop vite (rire) !

Votre franc-parler est bien connu... La L1, ça change quelque chose dans la façon de traiter les sujets abordés ?

Non... Je ne changerai jamais. Ce n'est pas dans ma nature. J'ai juste poussé deux ou trois coups de gueule. C'est normal aussi de marquer son territoire, mais c'est aussi logique de respecter des joueurs confirmés. Je ne fais plus de la formation et aujourd'hui, j'ai à faire avec des mecs qui ont du vécu... Il y a une manière différente de s'adresser à eux !

Difficile de se lancer dans ce type d'exercice sans s'occuper de ce qui a été fait avant...

Non, nous ne le voyons pas de cette façon. Je dis « nous », car c'est un sauvetage en famille. Il est important de se servir de toutes les choses qui ont été faites avant et d'apporter certaines touches personnelles. Après, il n'y a pas trente-six façons d'aborder les choses pour s'en sortir, il faut bosser. Je n'ai guère dormi depuis deux jours. Je suis un passionné. Un amoureux du ballon rond. Depuis ma nomination, j'ai avalé un nombre incalculable de matchs du Gym. Il faut que je sente cette équipe. Nous examinons déjà à la loupe avec Gaby et Roger les moindres détails des Nantais. Il est impératif d'être complet dans toutes les lignes. La remise en question a touché tous les rouages. M. Ricci, par exemple, a réussi rapidement à nous donner une indication intéressante sur l'état physique de chacun, la forme du moment et le poids de forme. Sans faire table rase du passé, nous essayons de repartir sur des bases solides. De la partie médicale à la séance vidéo, il faut tout maîtriser. Vous
imaginez, un entraîneur qui débarque et qui les presse comme des citrons sans savoir à quel niveau physique se trouve chaque joueur. Dans une semaine, nous aurons un aperçu complet du niveau physique de l'équipe. Sans révolutionner, il est important de professionnaliser l'ensemble et d'entraîner tout le monde dans son sillage. Il n'y a qu'en monopolisant toutes les forces que nous pouvons nous en sortir...

De quelle manière rester proche des gens et éviter de faire du Gemot Rohr ?

En faisant du « Buscher », tout simplement...

La relation avec les supporters pourrait être le maillon fort du maintien...

Énorme, énorme et énorme. Voire essentiel pour apporter une touche différente à cette question...

Il paraît que le club fait le forcing pour réaliser le déplacement à Ajaccio par exemple...

Je ne sais pas. J'évite de me projeter trop loin aussi. Aujourd'hui, les avis sont partagés autour de l'équipe et tout ce qui se passe. C'est normal et nous l'acceptons. En dehors du maintien, nous devons redonner l'envie d'avoir cette unité autour de l'équipe qu'il y avait lors des deux premières années. C'est pour cette raison que j'ai refusé de faire le stage à Saint-Martin-Vésubie. Je n'ai rien contre un séjour là-bas. Mais il fallait aussi que les gens nous voient, nous sentent et réalisent que personne ne triche. Depuis quelques jours, ils sont assez nombreux à l'entraînement et se rendent compte qu'aucun ne rechigne à se faire mal sur le terrain. Il faut rétablir le lien de confiance qu'il y avait. L'esprit est sain, l'atmosphère aussi. Nous n'avons rien à cacher. Les joueurs se donnent à fond. Les joueurs le veulent ce maintien et ils le montrent tous les jours à l'entraînement. La réponse aux supporters réside dans cette volonté de remettre le bleu de chauffe. Il y a un besoin de réidentification autour de l'équipe. C'est la clé de voûte de ces quatre derniers matches et derrière, il ne peut y avoir qu'une communion décisive...

Quel message voulez-vous faire passer ?

Je n'ai pas de message particulier. Il faut arrêter de se poser des questions et bien se rendre compte que le maintien est capital pour l'avenir du club. Il n'y a que ça qui compte et rien d'autre. Le seul message est que tout le monde réponde présent.

En dehors de ça, c'est assez fort cette façon de faire abstraction de ce qui se passera après les quatre prochaines journées..

Non. Le président me connaît bien. Nous nous sommes rencontrés. Je voulais que les choses soient précises. Elles le sont et j'ai été servi. Au moins, c'est clair et net. Ma mission s'arrête après ces quatre journées. Ensuite, Antonetti vraisemblablement ou un autre devrait me remplacer la saison prochaine... Je dis bien « devrait », car en foot tout peut se passer et même de voir le Gym descendre si l'on ne réagit pas ! Après je ne cherche rien. J'ai adhéré au projet et j'ai aimé cette façon d'aborder les choses. Il y a des possibilités d'intégrer le staff ensuite, mais c'est trop tôt pour en parler. Je veux juste prendre mon pied autour d'une mission de quatre matches...

Et après quatre victoires ?

Demandez au président (rire) ! Il n'y a pas d'ambiguïté autour de mon futur. C'est le terrain qui décide... de tout d'ailleurs ! Je ferai uniquement ce que l'on me dira. Je reste un salarié. Il est autant possible que j'intègre le staff pro que je retourne à la
formation. Je suis un passionné et un vrai amoureux de mon club. Je pense être entier et c'est pour cette raison que je suis certain de ne pas entraîner durant 20 ans !

Vous réfléchirez, sans doute, après les 41 points...

Cela peut suffire effectivement...

C'est optimiste comme chiffre pour le maintien, tout de même...

Non, il est important d'éviter de focaliser sur un barème. Il y a simplement quatre matches à gagner. Nous voulons gagner les deux à domicile au minimum pour ne pas se faire peur. C'est dans nos cordes. Il faut demeurer serein, car nous avons encore le maintien entre nos mains. Il n'y a que de nous-mêmes qu'il faut avoir peur ! A force de focaliser sur un retour de Bastia, certaines équipes vont finir par y laisser des plumes. Il y a pour moi au moins cinq équipes en danger... Ça restera serré jusqu'au bout.

Pour en revenir à votre avenir, combien d'années de contrat vous reste-t-il aujourd'hui ?

Deux ans.

La venue d'Antonetti, l'an prochain, ne semble être qu'un secret de polichinelle. Commencez-vous à travailler avec lui ?

Non... Je ne le connais pas. Par contre, si on me demande de rentrer en contact avec lui pour préparer la saison prochaine, je le ferai sans hésiter. Je le respecte, et si l'on me demande, je serai à 200% derrière lui. Je vous répète, que ce soit Antonetti ou un autre, je suis avant tout serviteur de mon club...

Vous démontrez une volonté d'apprendre et de progresser. Goûter au monde pro ne risque-t-il pas de changer la donne ?

Nous verrons bien en temps voulu.. Vous savez, rien n'est figé non plus, mis à part peut-être le fait que nous pouvons descendre. Insistez bien là-dessus. Il ne faut pas l'oublier. Le faire au soir de la dernière journée serait trop tard...

 

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