Bigné-Echouafni-Grenet:
Destins rouges et noirs...
Extrait
Que vous reste-t-il de vos années rennaises ?
Bigné : Je suis arrivé au
Stade Rennais à l'âge de treize ans, venant de Saint-Sulpicela-Forêt , dans la
banlieue rennaise . J'y ai effectué toutes mes classes disputé mon premier match
en pro, marqué mon premier but. Rennes reste le club de mes racines. Et y faire
toute ma carrière ne m'aurait pas dérangé. Mais Bergeroo ne comptait plus trop
sur moi. Gourcuff que j'aimais bien faisait ensuite ses choix, j'étais moins
titulaire. J'ai senti qu'il me fallait changer d'air, je commençais à
m'encroûter. Rennes allait chercher des joueurs à droite, à gauche, j'étais un
peu vexé. Partir m'a fait du bien. Mais je n'oublie pas les deux matchs d'Intertoto
contre la Juventus de Zizou et Inzaghi. 2-0 pour les Turinois chez eux, 2-2 au
retour mais nous les avions bougés, sans avoir de réussite.
Echouafni : Paul Le Guen m'a fait venir de Strasbourg. J'intéressais aussi
Bologne, Fulham et Lyon mais il avait un projet ambitieux. Et comme il avait
joué à mon poste, je savais que son expérience me serait précieuse. A l'époque,
Rennes avait le sixième budget européen, venait de recruter douze joueurs. La
pression était intense. Après quinze journées, nous étions quinzièmes. Le Guen
s'est retrouvé sur la sellette. Gourcuff l'a remplacé. Il misait sur les jeunes,
la formation et a enlevé les joueurs d'expérience. Mais l'équipe ne tournait
toujours pas et il nous a rappelés. Mais je me suis gravement blessé à Monaco,
en décembre. Un tacle par derrière de Nyarko. Arrachement des ligaments d'un
genou, huit mois d'arrêt. Bergeroo est arrivé, m'a permis de revenir doucement
dans le coup, j'étais opérationnel fin septembre. Halilhodzic a remplacé
Bergeroo. Il nous faisait bosser comme des malades et adorait le conflit,
parfois un peu trop. Il parlait toujours de respect mais en fait ne respectait
pas les joueurs. Six victoires consécutives nous ont relancés mais je me suis
retrouvé remplaçant sans réelle explication. A Rennes, au total, j'ai connu
beaucoup de déceptions, une blessure m'a vraiment contrarié. Pourtant je retiens
surtout de ces années la naissance de mon fils, mon petit Lény adoré. Je crois
qu'Halilhodzic n'a pas apprécié que je ne lui téléphone pas en premier pour lui
annoncer que j'étais papa. Il a signé à Paris et Boloni est arrivé. J'ai donc eu
quatre entraîneurs en trois ans...
Grenet: J'arrivais d'Angleterre, de Derby County. Les six premiers mois se sont bien passés. Mais début 2003, j'ai été victime d'une déchirure à un mollet. Cette blessure a pourri ma fin de saison. J'ai ensuite souffert des tendons d'Achille alors qu'à Bordeaux j'avais effectué des saisons à plus de 50 matchs sans problème. Les blessures ont gâché mes deux saisons rennaises. J'ai été« noir » !
A votre arrivée à Nice, étiez vous un laissé-pour-compte ?
Bigné: A Rennes, les entraîneurs ne me faisaient plus trop confiance. Je suis arrivé à Nice avec une grosse envie et j'ai prouvé en une saison que j'avais ma place. J'avais les crocs comme d'autres joueurs prêtés : Diawara, Pancho, Gregorini ou désirant se faire un nom, comme Everson...
Echouafni: Pendant
mes cinq dernières semaines à Rennes, j'ai été totalement écarté, m'entraînant
avec les moins de seize ans ! j'étais devenu indésirable. La proposition de Nice
est arrivée, je l'ai acceptée. Je rentrais
chez moi, sur la Côte, avec une grosse envie, dans un club voulant se
stabiliser. L'accueil a été formidable.
Grenet: Pendant mes
blessures, le train avançait et je n'étais plus à bord, c'est la loi du sport.
Et j'avais conscience, en fonction du recrutement, que l'on ne comptait plus
trop sur moi. A Rennes, mon avenir était bouché. Mais Rohr que j'avais bien
connu au centre de formation des Girondins me voulait. Et moi, j'avais envie de
retrouver le terrain, quelques sensations. Je savais que Rohr me donnerait ma
chance s'il m'estimait prêt, si je revenais bien physiquement mais il ne m'a
rien promis au niveau temps de jeu. Je partais dans l'inconnu puisque j'avais
très peu joué pendant un an.
Cette fameuse
ambiance familiale, conviviale, qui règne à l'OGCN ?
Bigné : C'est moins familial qu'à mon arrivée. Le club se structure, tout devient plus carré, avec par exemple la cellule vidéo.
Echouafni : Rien à voir avec Rennes. Ici on a tendance à se lâcher, à rigoler. Là-bas, c'était plus froid, plus crispé, avec des gens plus simples spectateurs que supporters. Parfois, à domicile, nous évoluions dans un silence de cathédrale. Au Ray, il n'y a que des supporters !
Grenet : Ici, ça vit,
c'est le soleil, la gaîté. A Rennes les gens semblent fermés au premier abord
mais quand on apprend à les connaître, ils sont généreux, entiers. Sportivement
, Rennes m'a laissé un goût d'inachevé. Mais humainement, je garde de bons
souvenirs. Et mon fils Antoine est né à Rennes.
Avez-vous
l'impression que Nice vous a relancé ?
Bigné : Mes deux premières saisons se sont bien passées. La saison dernière, j'ai été victime d'une déchirure à la cuisse et eu du mal à revenir. Mais j'ai disputé quatre des cinq derniers matchs. - Globalement, le bilan est positif.
Echouafni : Bien sûr. J'aurais très bien pu rester à Rennes jusqu'à la fin de la saison. Mais je voulais rejouer.
Grenet : Les six premiers
mois. Après la trêve, j'ai eu du mal la saison passée. Actuellement, c'est plus
compliqué . Mais je suis un compétiteur qui donne 100% voire plus de ses
possibilités, qui veut toujours gagner. Même au trivial pursuit.
Suivez-vous toujours Rennes ?
Bigné : Sans plus, je suis moins accro qu'après mon arrivée à Nice. Aujourd'hui, je regarde les résultats. De temps en temps j'appelle des copains comme Etienne Didot. Mais je suis devenu plus nissart que rennais.
Echouafni : Absolument. Je m'intéresse toujours au parcours de mes anciens clubs . Je suis ainsi peiné de voir Strasbourg ramer. En ce qui concerne Rennes, j'ai un profond respect pour François Pinault, l'actionnaire principal. Il possède la deuxième fortune de France mais il a toujours pris de mes nouvelles.
Grenet : Evidemment. Par
la presse. Et j'ai encore des copains dans l'équipe : Monterrubio, Didot,
Jeunechamp mais aussi des jeunes tels Gourcuff, Briand, Bourillon que j'ai
connus lorsque j'ai repris en CFA après ma blessure.
Quelque chose de
Bretagne qui vous manque ?
Bigné : La famille, les déjeuners du dimanche avec mes parents. Et les sorties avec les potes pour boire un verre.
Echouafni : Les fruits de mer, les huîtres. Je me souviens d'un fabuleux repas à Ile-surBellon, avec les dirigeants. Homard et langoustes à gogo et tout au champagne. La pluie par contre ne me manque pas. Quand je suis arrivé à Rennes, il a plu pendant pratiquement six mois. De quoi vous donner le cafard.
Grenet : Rien de bien
précis. Peut-être une douceur de vivre. Rennes est une « grande-petite » ville.
Dirigeant, vous pouvez recruter le Rennais de votre choix...
Bigné : Monterrubio. Un roi de la dernière passe, avec une grande qualité de centre, une remarquable technique. Et c'est un super mec qui ne se prend pas la tête.
Echouafni : Je ne prends personne. Le faire ne serait pas sympa pour le Niçois qu'il remplacerait. Et nous avons des joueurs aussi bons que les Rennais...
Grenet : Je choisis le
petit Gourcuff. Un créateur à la grande vision de jeu, qui a vraiment « du
ballon » comme l'on dit.
Boloni ?
Bigné : Je ne le connais pas. Mais on m'a dit qu'il faisait bien bosser l'équipe. En fait, je me fiche de Boloni...
Echouafni : Il commençait
souvent ses phrases par « je crois... ». Au cours de la seule discussion que
j'ai eue avec lui, il regardait dans le vide...
Grenet : Un bon
entraîneur, rigoureux. Mais humainement, je ne l'ai pas trop apprécié. Il roule
pour
lui, déborde d'ambitions personnelles, n'est pas franc du collier. Je crois
qu'il aime bien sa petite personne, sans avoir l'air d'y toucher.
Le Rennais à
surveiller en priorité dimanche ?
Bigné : Monterrubio, c'est le pourvoyeur, et Utaka.
Echouafni : Attention aux centres de Monterrubio, à Frei, un renard des surfaces, mais aussi à Yohann Gourcuff, un jeune qui monte. Un milieu très technique, plein d'avenir.
Grenet : Il faudra couper la relation entre Monterrubio et Frei. Kallstroem et Gourcuff peuvent aussi avoir un éclair décisif.
Rennes est 10e, à quatre points devant Nice. Mais les Bretons ont-ils vraiment un potentiel supérieur ?
Bigné : Ils ont presque le même système tactique que nous. Mais ils sont intraitables à domicile. Et ont plus de mal en déplacement. Le contraire de nous. Et depuis deux ans, ils travaillent dans la continuité, avec le même groupe. Nous avons une bonne équipe, notre match contre Lyon l'a prouvé, et les moyens bien sûr de viser plus haut que la quatorzième place. Mais au niveau infrastructures, Rennes est largement devant. Heureusement , Nice va avoir un nouveau stade. Rennes commence à être un gros club, avec un super stade, 30 000 spectateurs, des jeunes qui s'affirment. Dans quatre ou cinq ans, les Rennais termineront dans les trois premiers.
Echouafni : A domicile, ils sont très performants. Mais nous avons peut-être plus d'avenir. Si Rennes a en effet franchi quelques étapes, Nice n'a pas encore de très bonnes structures...
Grenet : Nous devrions
facilement occuper leur place. Rennes et Nice se tiennent en valeur.
Le très bon match de
l'équipe contre Lyon a-t-il changé quelque chose avant ce déplacement ?
Bigné : Ce sera plus dur à Rennes que contre Lyon. Face au leader invaincu, tout le monde était à fond. Dimanche, on va voir si nous pouvons rester aussi concentrés. Ne croyons surtout pas que tout est acquis. Rennes a perdu de justesse à Sochaux et voudra s'imposer. Chez lui, il est sans pitié. La saison passée, nous avons perdu 4-1 à Rennes. .
Echouafni : Chaque match est différent. A l'extérieur , nous avons des certitudes, les résultats plaident en notre faveur. A domicile, Lyon constitue enfin notre match référence. Mais c'est face à Ajaccio, notre prochaine rencontre au Ray, que l'on verra si nous avons franchi un palier.
Grenet : Nous n'avons pas
gagné. Mais Nice a réussi son plus gros match depuis le début de saison face à
une équipe souveraine. Et nous ressortons gonflés de cette rencontre, avec des
certitudes : il faut s'arracher, être solidaires et que ce soit toujours le cas.
Contre Lyon, personne n'a évolué avec le frein à main. Nous n'avions rien à
perdre et nous nous sommes libérés.
Pourquoi ce Nice plus
convaincant et surtout performant l'extérieur ?
Bigné : A domicile, nous n'avons pas de réussite, manquons de réalisme. Nous avons des occasions mais nous ne marquons pas. Reste que tout n'est pas mauvais, il ne faut pas regarder que les points. Nous produisons plus de jeu que la saison passée, sommes en progrès . Continuons à travailler et le vent va tourner. Si nous jouions mal, nous pourrions nous poser des questions.
Echouafni : A domicile, nous accumulons les occasions ratées. Sauf contre Bordeaux, nous avons toujours eu l'opportunité de gagner mais sans la saisir. Et cela a marqué les esprits, entraîné une perte de confiance.
Grenet : Il est flagrant
que nous manquons de confiance à domicile. Mais je crois que l'équipe a un
profil pour être plus à l'aise à l'extérieur, avec notamment des milieux qui
récupèrent bien le ballon et portent vite le danger. Par contre, nous avons plus
de mal dans la construction à domicile.
Six buts en neuf matchs à domicile, une « misère »...
Bigné : Toutes ces occasions gâchées, ça fait beaucoup. Sans oublier Sochaux quand l'arbitre nous vole le match.
Echouafni : Oui mais défensivement, nous n'avons encaissé que cinq buts lors des dix derniers matchs.
Grenet : Au Ray, Nice
doit être un peu plus agressif dans les duels, la récupérat'rôn, montrer les
crocs. Cette agressivité doit être présente dans tout ce que nous entreprenons.
A quelle place Nice va-t-il terminer le championnat ?
Bigné : Dans les dix premiers. Nous pouvons viser la sixième, septième place si nous trouvons le réalisme offensif. Nous pourrions déjà l'occuper si nous avions mis au fond nos occasions.
Echouafni : Entre la 7e et la 10e. Nous aimerions bien être dans les quatre premiers mais ce serait brûler les étapes, au risque de retomber bien plus bas ensuite. La réalité, c'est notre quatorzième place actuelle. Nous voulons regarder vers l'avant mais faisons aussi attention derrière...
Grenet : 8eme. C'est ce
que nous valons. A l'heure actuelle, sans toutes nos occasions gâchées et le
match volé contre Sochaux, nous mériterions d'avoir au moins six points de plus
Votre avenir à Nice ?
Bigné : Je suis sous contrat jusqu'en juin 2008. J'aurai alors 31 ans. Physiquement, ça va et j'espère continuer jusqu'à 34, 35 ans. J'ai envie d'être ambitieux, de jouer de grands matchs, en Coupe de l'UEFA pour commencer. Les rencontres où Nice était leader la saison de mon arrivée restent de super souvenirs. Il aurait été magnifique de terminer dans les trois premiers. Mais il ne faut pas brûler les étapes.
Echouafni : Je serai en fin de contrat en juin. J'aurai 33 ans mais je me sens capable de continuer. Tous les jours je me lève, content d'aller faire mon métier.
Grenet : Moi aussi , je
serai en fin de contrat au terme de cette saison. Pour l'instant, mon objectif
est de refaire partie du groupe pour les matchs. Je m'accroche, je bosse. Et je
joue avec plaisir en CFA. Je me dois de montrer l'exemple aux jeunes. Quand
j'avais leur âge et que je jouais avec la réserve des Girondins, je râlais de
voir des pros se comporter en dilettantes parce qu'ils se retrouvaient en CFA.
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