Florent Balmont:
«Le milieu défensif doit faire vivre le ballon, se multiplier»
Extrait Libération
Comment définiriez-vous
votre style ?
Agressif. Je harcèle, je colle au ballon. J'en touche aussi beaucoup, car j'aime
bien suivre les actions. Je suis bien dans le jeu court, moins à l'aise quand il
faut jouer long. Après, il y a les consignes des entraîneurs ; ne pas me jeter
vers l'avant ou me laisser entraîner sur les côtés.
Comment expliquez-vous la différence entre votre cote dans le milieu et
l'absence de reconnaissance du grand public ?
Je crois que ça a à
voir avec mon rôle, moins valorisé que celui des attaquants. Les milieux
défensifs peuvent vraiment faire du bien à l'équipe, mais le public ne le voit
pas. On travaille dans l'ombre. Peut-être aussi suis-je resté trop longtemps
sous contrat avec l'Olympique lyonnais ; j'ai perdu un an ou deux. Cette année,
même si Paul Le Guen ou Jean-Michel Aulas voulaient me garder, j'ai senti que je
ferais une fois de plus l'appoint. Donc, je suis parti. Déjà, l'an passé,
j'avais dû insister pour être prêté à Toulouse. Jouer m'a fait beaucoup de bien.
Peut-on prendre du plaisir au poste de demi défensif ?
Si on aime la bagarre et courir, oui. Moi, j'aime courir depuis que je suis
gosse. Ensuite, on est au centre du terrain ; alors que ceux qui jouent sur les
côtés ne voient parfois pas un ballon du match. Récupérer le cuir proprement, le
petit coup d'oeil, permettre au coéquipier d'enchaîner simplement vers l'avant :
c'est là que je vais chercher le plaisir. En revanche, je ne crois pas que ce
soit un poste plus «intelligent» qu'un autre. Le milieu de terrain défensif doit
avoir une vraie intelligence du placement. Les défenseurs doivent avoir une
intelligence des trajectoires, et les attaquants une intelligence de course.
Ne ressentez-vous pas
de frustration ?
Dans le milieu du
foot, il y a de la reconnaissance, c'est ça qui compte. Il y a deux ans, quand
je me suis rompu les ligaments croisés, José Broissard (alors entraîneur au
centre de formation de l'OL, ndlr) a parlé de moi comme d'un «grand joueur». Ça
m'a fait quelque chose. Aujourd'hui, des adversaires que je ne connais pas
personnellement me félicitent après les matchs. Certains m'appellent par mon
prénom. Il y a deux semaines, le Lensois Eric Cubiller a dit qu'il avait entendu
parler de moi avant le match, mais que ce qu'il avait découvert sur le terrain
était mieux que ce qu'il s'était imaginé.
Votre gabarit (1,70 mètre, 64 kg) ne vous dessert-il pas ?
A mon poste, la mode
est à 200 % aux grands costauds. Paul Le Guen ne s'en cache pas, il veut des
mecs très physiques au milieu de terrain, pour gagner en puissance et en
densité. Il ne devait pas aimer mon style : plus vif sur les appuis, plus rapide
au démarrage, meilleur pour ce qui est de pousser le ballon au ras du sol.
Le poste a-t-il
évolué depuis vos débuts en pro ?
Oui. Avant, les
milieux défensifs étaient des gars qui comptaient de 200 à 250 matchs dans
l'élite. Des joueurs rassurants, chargés de mettre le pied sur le ballon sans
trop courir. Aujourd'hui, la charge de mener le jeu s'est déplacée vers
l'arrière ; le milieu défensif doit faire vivre le ballon, se multiplier. Ça
explique peut-être pourquoi ceux qui occupent le poste sont plus jeunes.
Est-ce gratifiant
d'être abonné à des clubs qui visent le maintien en L1 ?
L'an passé, avec
Toulouse, j'ai été sur le fil toute la saison. Avec les douze petits points
qu'elle avait engrangés à la trêve, l'équipe a vu la porte du maintien
s'entrouvrir ou se fermer pendant des mois. A la limite, chaque erreur de
placement sur le terrain risque de vous faire glisser une division plus bas. On
y gagne une carapace. La vie est différente : les critiques des supporters, la
pression qui vient du dessus, les joueurs qui se précipitent à la fin des matchs
pour connaître les résultats, les journées passées à décortiquer le classement,
les spéculations sur la suite du calendrier... Je peux vous dire que je me
souviendrais longtemps de la soirée qui a suivi le jour où l'on s'est sauvé.