Louis Bacchialoni:

"Il ne serait pas légitime de perdre de l'argent"

 

Extrait

 

Les relations sont-elles toujours aussi bonnes entre les actionnaires ?

À l'image du club, les relations entre chacun d'entre nous deviennent « matures » avec le temps. Elles restent saines parce que nous n'hésitons pas à nous dire les choses, sans détour. Nous vivons un début de saison difficile, mais pas catastrophique, on s'attelle donc à améliorer le travail d'équipe. Dans cette optique, je trouve vraiment positif le rapprochement entre Gernot Rohr et Roger Ricort. Comme dans un couple, la relation entre les différents acteurs du club, notamment les actionnaires, se bonifie avec le temps. Lorsque nous avons décidé d'investir, il s'agissait de sauver le club avec l'ambition de construire sur du long terme. Il n'y a jamais eu d'ambition personnelle déclarée, chacun veut apporter sa contribution au développement de l'OGC Nice.

Comment avez-vous abordé les derniers soubresauts de ces dernières semaines ?

Il s'agit de soubresauts légitimes, qui doivent nous servir de leçon. Même si nous essayons toujours d'anticiper dans tous les domaines, notamment celui du recrutement, les événements qui se sont déroulés dernièrement ont prouvé qu'il fallait aussi envisager des départs non programmés. Cela nous servira pour l'avenir ! Mais malgré tout, je pense que le club se pérennise.

Financièrement, la situation du club semble désormais plus que stable...

La politique menée depuis notre arrivée à la tête du club a permis de redresser la barre d'un point de vue financier et de pouvoir aujourd'hui présenter des comptes sains. Mais nous avons conscience que pour répondre à la demande du public d'avoir la meilleure équipe possible, il faut essayer de réinvestir les bénéfices réalisés.

L'objectif n'est donc pas de se partager une partie de ces derniers ?

Comme je le disais précédemment, je ne pense pas qu'un d'entre nous ait investi à des fins personnelles... mais pour autant, il ne serait pas légitime de perdre de l'argent. On essaye donc que la gestion soit la meilleure possible et qu'elle permette de construire le club sur des bases solides. Personnellement, monter au stade est un plaisir. Lorsque je vois ce que génère le club de discussions et de vie à travers la ville, je me dis que ce que l'on vit vaut très cher. Maintenant, ce n'est pas une
finalité. Notre prochain objectif sur un plan financier est de doubler le budget dans les trois ans à venir, mais pas en faisant n'importe quoi, en gardant notre rigueur actuelle. Cela nous permettra de conserver le noyau dur de l'équipe en améliorant progressivement chaque ligne. Dans le même temps, avec l'arrivée du Grand Stade, nous travaillerons sur une nouvelle politique de prix, difficilement applicable dans la configuration actuelle du Ray. Autant j'estime légitime que les prix des loges soient chers, autant les places en Populaires doivent être abordables. Mais les supporters doivent comprendre que l'application de cette politique n'est pas envisageable pour le moment.

Comment envisagez -vous l'arrivée plus ou moins programmée d'un investisseur à moyen terme ?

Elle ne se fera pas comme ça. Nous devons appâter les gros investisseurs en leur
faisant prendre conscience du potentiel de développement du club à moyen et à long terme. Mais si nous avons conscience de cette nécessité pour franchir un nouveau palier, il ne faut pas que le club nous échappe. En effet, notre volonté n'est pas de donner les clés de l'OGC Nice à un investisseur extérieur, mais de trouver un partenaire pour donner de nouveaux moyens et construire ensemble un club de dimension européenne.

Lors d'une interview en début de saison, le Président Cohen évoquait la possibilité qu'il ne soit plus à la tête du club dans un proche avenir. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Que le Président passe la main ? À ma connaissance, il n'en a pas été question. Après, il est possible qu'un jour, il estimera être allé au bout de son investissement et souhaitera alors passer à autre chose, mais je ne pense pas que ce moment soit arrivé. De toute manière, il faut garder en tête que nous sommes tous de passage. C'est pour ces raisons qu'un de nos rôles est aussi de préparer l'après...

On ne peut parler d'avenir sans revenir une nouvelle fois sur le fil rouge que constitue le Grand Stade. Où en est-on ?

Très honnêtement, je n'en sais rien... Bien entendu, je sais que des réunions se déroulent de temps en temps, mais sans savoir réellement qu'elles sont les prochaines étapes. Beaucoup de choses sont d'ailleurs dites à ce sujet et j'espère simplement que nous ne prendrons pas à nouveau du retard et que nous disposerons d'un formidable outil pour la date annoncée de 2007.

Alors Plaine du Var ou stade du Ray ?

Vous savez, je monte au stade depuis le milieu des années 50 et je peux vous dire que le Ray n'est plus aujourd'hui celui que j'ai connu... Je comprends l'attachement des supporters à la tribune Sud, par exemple, par rapport à ce qu'ils ont construit et vécu derrière ce but, mais il faut comprendre que nous sommes à un virage de notre histoire. L'OGC Nice a besoin d'un outil adapté de 30 000 places pour accueillir
ses supporters dans les meilleures conditions et en offrant le maximum de confort et de prestations. Et si vous analysez un petit peu les choses, de nos jours, tous les stades se construisent en périphérie des villes. Donc plutôt que de continuer sur ce débat, je pense qu'il faudrait que les supporters apportent leur réflexion, proposent des choses pour que ce stade soit le plus en rapport avec ce qu'ils souhaitent réellement. Nous avons besoin de leur avis parce que ce sont eux qui vont le faire vivre. Mais actuellement, il y a ce mouvement « Ray é basta » et je ne trouve pas son action constructive. Qu'est-ce qu'il propose ? On peut être contre quelque chose, mais il faut une force de proposition derrière. Le seul argument recevable concerne l'accessibilité pour les Niçois, et sur ce point, nous comptons sur les pouvoirs publics. Il y a des possibilités d'aménagement.

Justement, quels sont les moyens envisagés pour remplir une enceinte de plus de 30 000 places ?

Il est encore tôt pour évoquer cela, même si nous savons dans quels domaines travailler. Comme je l'évoquais précédemment, la configuration du stade nous laissera des nouvelles possibilités pour pratiquer des tarifs différentiés et permettre à toutes les bourses de pouvoir venir suivre les matches dans le nouveau stade. Je le répète, les gens doivent comprendre qu'actuellement et tant que l'équipe évoluera au Ray, il ne sera pas possible de proposer un panel de prix comme nous aimerions le faire. Dans le même temps, il va falloir communiquer pour expliquer que l'OGC Nice est une entreprise sportive qui est amenée à se développer pour exister. Donc culturellement, même si le club doit toujours appartenir à sa population, le développement passe par une ouverture sur un nouveau public. Nous avons trois ans pour communiquer sur cette idée et préparer le futur. Mais tout ne passe pas par l'extérieur, nous avons également des progrès à faire en interne. Chaque membre du club doit continuer à fournir les efforts consentis depuis la remontée et se professionnaliser encore plus dans son domaine. La participation des dirigeants doit être encore plus importante et de façon toujours plus concertée. Toutes les réussites au niveau des entreprises, comme dans le sport, ont montré que l'on est plus fort si on est plus nombreux autour d'une plateforme d'idées. Pour cela, il faut accepter qu'il y ait des courants de pensée différents.

Conserver sa place parmi l'élite reste donc une priorité pour construire dans la sérénité...

Tout à fait, c'est indispensable ! Mais j'ai confiance car j'estime qu'avec Gernot Rohr et Roger Ricort (pour ne citer qu'eux), nous avons de vrais professionnels dans le domaine sportif. Avec cela, on a aussi un grand public, même si je ne suis pas d'accord sur tout, comme la polémique du Grand Stade. Tous les ingrédients sont réunis pour continuer à progresser.

Comment avez vous vécu la mutation du groupe ?

Je pense qu'elle était inévitable... Pour Romain par exemple, il était compréhensible qu'à 28 ans, vu le contrat que lui proposait Sochaux, il veuille partir. Mais il ne faut pas voir les choses que sous cet angle, les nouveaux qui arrivent ont également de la valeur. On peut même penser que l'on gagne au change. Lorsque vous voyez le coût du transfert de Florent Balmont par rapport à son âge, on peut se dire que l'on a réalisé un gros coup. Le départ d'un joueur est dans l'ordre des choses, cela fait partie de la vie d'un club, il faut simplement en tirer le meilleur parti.

On craignait les effets négatifs d'une crise, mais finalement n'aura-t-elle pas resserré les liens ?

Cela aura permis de responsabiliser les uns et les autres. Il n'y a que dans l'adversité que l'on peut analyser la force de réaction de chacun et cette période nous aura servis aussi à ça. On a été conforté dans l'idée qu'il y a des personnes responsables dans le club, qui ont pris conscience de l'importance de travailler en équipe.

Estimez-vous que des erreurs ont été commises dans la gestion du club jusqu'à aujourd'hui ?

Sur un plan sportif et sans parler d'erreurs, je pense que l'on aurait pu faire mieux la saison dernière. Pour diverses raisons, l'équipe n'a pas terminé le championnat comme elle l'a commencé, mais c'est aussi de cette façon que l'on apprend pour l'avenir. Ensuite, au niveau des administrateurs et au-delà de certaines décisions
qui peuvent toujours être discutées, je souhaite ressortir un aspect particulièrement positif qui concerne la relation entre la direction et le public. Même si
on ne peut pas toujours aller dans le sens du public, on a un profond respect pour ce que représente le mythe OGC Nice. Je ressens que tous les administrateurs respectent l'importance du club dans le patrimoine de la ville. À partir du moment où les gens ont cela, ils savent que les erreurs qui peuvent être commises ne le sont pas volontairement. Tant que nous serons là, nous ferons le maximum pour pérenniser le mythe OGC Nice et aider à son développement. Comme je le disais précédemment,
nous sommes tous de passage...

L'aventure rouge et noire vous a-t-elle détourné totalement du basket féminin au Cavigal ?

Non, pas du tout ! En plus d'une réelle passion pour ce sport, mon implication dans le basket me permet de participer à la vie de mon quartier d'origine, Saint-Roch. C'est important pour moi. D'ailleurs, je rêve toujours que L'on y construise une halle aux sports. Le football, c'est autre chose. Un sport fédérateur, bien plus que les Jeux Olympiques. Encore plus encore depuis que je suis administrateur au Gym, je me rends compte de l'importance qu'a le club dans la ville. Nous avons des responsabilités et un réel rôle social à jouer à Nice.

N'était-il pas difficile de concilier les deux ?

Parfois... J'ai même des reproches de mes fils qui se plaignent que je ne les informe pas assez sur la vie du club. (rires) En fait, je prends un plaisir différent à travers ces deux sports. Pour moi, le football est un plaisir communautaire, alors que le basket est un sport que je vénère. D'ailleurs, j'en profite pour passer un petit message à tous les footeux : il faudrait qu'il y en ait un peu plus qui s'essayent au ballon orange.

Un jour ou l'autre, un choix ne sera-t-il pas nécessaire ?

Je passerai la main un jour, c'est sûr. Mais je ne pense pas que l'on ait le droit refuser ce que l'on est. Avec Maurice (Cohen), nous avons repris le Cavigal avec 4 millions de francs de dettes et aujourd'hui il n'en a plus que 200 000. On essaye donc de continuer le travail commencé, même si l'implication est moindre. Je pense qu'il ne faut pas trop se poser de questions et apporter ce que l'on peut jusqu'au moment où l'on passera le témoin.
 

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